Statue du Grand-Duc Jean : « Nous avons joué de malchance »

Le Comité Alstad, qui joue un rôle de conservateur du patrimoine historique de la vieille ville de Luxembourg, souhaite ériger un monument à la mémoire du Grand-Duc Jean. Le gouvernement l’a court-circuité malgré lui en ayant la même idée. Claude Esch, le secrétaire général du comité, fait le point sur la pétition lancée à cet effet en mai dernier et qui n’a pas connu le succès escompté.

Le Comité Alstad a lancé une pétition en faveur de l’érection d’une statue en mémoire du Grand-Duc Jean. Vous allez la remettre à la Chambre des députés demain. Mais vous n’avez pas rassemblé suffisamment de signatures. Les gens ont-ils déjà oublié le Grand-Duc ?

Non. Nous avons récolté 350 signatures. Nous avons joué de malchance. Le jour où nous avons lancé notre pétition, le gouvernement a annoncé son intention de créer une commission avec la même visée. Samedi passé, nous avons fait signer notre pétition dans la Grand-Rue de Luxembourg. Les gens que nous avons rencontrés à cette occasion n’ont pas compris le sens de notre pétition, puisque le gouvernement s’était déjà prononcé en faveur de ce monument. Ils n’ont pas compris que pour le moment il n’est question que d’une commission et de rien d’autre.

Le projet a-t-il dépassé le stade de la proposition ?

Nous n’avons pas encore de modèle ni d’artiste pour réaliser la statue. Nous avons d’ores et déjà rencontré la ministre de la Culture, Sam Tanson, pour lui exposer nos idées. Nous souhaiterions que l’artiste choisi soit luxembourgeois, que ce monument soit érigé au Marché-aux-Poissons et que nous puissions participer aux travaux de la commission. Mais je dois dire que le gouvernement n’est pas très content de notre initiative.

Pourquoi l’installer au Marché-aux-Poissons ?

C’est dans un triangle composé de l’église Saint-Michel, qui était l’église de la famille grand-ducale, du musée national d’Histoire et d’Art –le Grand-Duc Jean était un grand amateur d’art– et du Palais grand-ducal. Comme il n’est pas d’usage d’installer deux statues sur la même place, selon Robert Philippart, les endroits qui s’y prêtent sont plutôt rares à Luxembourg. La place de la Constitution aurait été un endroit intéressant, mais il y a déjà la Gëlle Fra. Il reste l’arrière du Palais grand-ducal comme lieu potentiel. Devant, il n’y a pas assez de place.

Comment imaginez-vous la statue ?

Certains aimeraient une représentation du Grand-Duc Jean en uniforme, d’autres en civil. Personnellement, je l’imagine souriant, assis à son bureau, comme sur une photographie que j’ai découverte récemment. Cela changerait des habituels monarques en uniformes avec le képi et l’épée, bien que ce soit une des facettes de sa personnalité. Il a également été militaire.

D’où vous est venue l’idée de la pétition ?

Il y avait cette émission sur RTL lors de laquelle un journaliste a interrogé Robert Philippart sur l’éventualité de la création d’un monument en mémoire du Grand-Duc Jean et sur la manière de la réaliser. Robert Philippart a répondu que le meilleur moyen était une pétition. Ça a fait tilt! Je ne sais pas si cela va marcher.

Quelles sont vos prochaines démarches en faveur de ce monument ?

Nous allons remettre la pétition à la Chambre des députés ce jeudi et nous avons demandé une entrevue avec le Premier ministre, Xavier Bettel, dans l’espoir de pouvoir intégrer cette commission et y représenter les citoyens luxembourgeois.

Quels sont les artistes que vous souhaiteriez voir réaliser le monument ?

J’aime beaucoup Benedicte Weis, qui avait réalisé un des projets de statue de la Grande-Duchesse Charlotte. Elle avait obtenu le deuxième prix du concours à l’époque. Et pourquoi pas Serge Ecker, qui a réalisé la Mélusine qui se trouve sur les rives de l’Alzette, dans le Grund.

Quels étaient les rapports du Comité Alstad avec la famille grand-ducale ?

Le Comité Alstad a toujours eu de bons contacts avec le Palais et avec le Grand-Duc Jean. Nous avons été reçus en audience privée à plusieurs reprises et c’était magnifique. Le 19 janvier dernier, le Grand-Duc Jean était venu assister au concert que nous avions organisé pour les 90 ans de l’accession au trône de la Grande-Duchesse Charlotte. Après le concert, nous lui avons présenté l’horloge restaurée de l’église Saint-Michel, où nous nous trouvions. J’ai été impressionné par les questions précises que cet homme de 98 ans a posées à l’horloger qui s’était occupé de la restauration.

Le Grand-Duc Jean est mort trop tôt…

Vous ne croyez pas si bien dire ! Le Comité Alstad avait fait une demande pour organiser une grande exposition en 2021 à l’occasion de son centenaire. La Cour nous avait donné son accord. Nous y travaillons depuis plus d’un an.

Sophie Kieffer