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Mondial féminin/Bleues : l’exigeante Corinne Diacre, en mission première étoile


Rigueur, c'est le mot qui revient en boucle dans la bouche de ses joueuses pour décrire la technicienne de 44 ans. (photo AFP)

Avec elle, « tu suis, et si tu suis pas, tu te fais défoncer », plaisante son ancienne coéquipière Marinette Pichon. Réputée pour son exigence, la sélectionneuse Corinne Diacre a la délicate mission d’apporter enfin un grand titre à l’équipe de France, pour la Coupe du monde à domicile (7 juin-7 juillet).

Rigueur, c’est le mot qui revient en boucle dans la bouche de ses joueuses pour décrire la technicienne de 44 ans. C’est avec cet ingrédient qu’elle a construit sa carrière, de capitaine de l’équipe de France à première femme à entraîner une équipe d’hommes à Clermont (L2), jusqu’à prendre les commandes des Bleues depuis août 2017.

« Elle n’a jamais été forcément dans l’affect. Quand elle était capitaine, elle n’était pas là pour nous passer la pommade dans le dos. C’est normal. Un leader, on est obligé de la suivre », raconte encore Marinette Pichon, à propos de « Coco ».

Modeste et loyale

Le parcours de Diacre est d’abord associé à Soyaux, petite ville non loin d’Angoulême et bastion historique du football féminin. C’est le club qu’elle a rejoint dès ses 14 ans et où elle a bâti toute sa carrière de joueuse, en défense, jusqu’à devenir une taulière de l’équipe de France. Avec le maillot bleu, son plus haut fait fut son but contre l’Angleterre en novembre 2002, permettant à la France de décrocher pour la première fois une qualification en Coupe du monde, lors de l’édition 2003.

Mais sur cette anecdote comme sur d’autres, la native de Croix, dans le Nord, répond avec modestie. « C’est réducteur de m’accorder cette victoire, c’est plutôt une victoire collective ou alors on fait 50/50 avec Marinette Pichon qui avait marqué au match aller ! » Après sa carrière de joueuse, Diacre se tourne assez naturellement vers le métier d’entraîneur. « Avant de démarrer mon cursus de formation dans le football, j’ai toujours voulu être prof’ d’éducation physique donc enseigner, ça faisait partie de moi », souligne-t-elle.

Jugée sur le terrain

En attendant d’obtenir ses diplômes, elle commence sur le banc de Soyaux et en tant qu’adjointe chez les Bleues de Bruno Bini. Puis deux coups de fil de Claude Michy, le président de Clermont, en font la première femme à entraîner une équipe masculine en France (en L2), de 2014 à 2017. La presse veut l’ériger en symbole; elle demande à être jugée sur le terrain.

« Elle ne le vivait pas obligatoirement très bien. Les questions (des journalistes) étaient toujours à la con. Chacun lui demandait quand est-ce qu’elle rentrait dans le vestiaire, quoi… C’était quand même bas niveau », se souvient Claude Michy. Les débuts sont en demi-teinte, puis les résultats, probants, finissent par arriver. Diacre fait grandir le club et obtient la reconnaissance de ses joueurs comme Gaëtan Laborde, qui dira dans la presse qu’elle a tout simplement « sauvé sa carrière ».

Noël Le Graët, le président de la Fédération, tente de la débaucher une première fois en 2016, sans succès. Diacre préfère poursuivre l’expérience clermontoise. « Elle m’a dit, ‘Moi je suis fidèle et je reste avec vous’. C’est tout de même assez exceptionnel, surtout dans ce milieu », la complimente Claude Michy.

Un an plus tard, rebelote après l’échec des Bleues à l’Euro. Cette fois, c’est la bonne. Diacre prend le poste, qu’elle sait particulièrement exposé avec cette Coupe du monde. Comme à Clermont, elle fait des choix forts. Elle retire le brassard de capitaine à Wendie Renard, pour le confier à Amandine Henry. Elle recadre publiquement certaines jeunes joueuses, inconstantes. Et finit par se passer de Marie-Antoinette Katoto, certes meilleure buteuse du championnat de France, mais trop irrégulière et pas assez combative à ses yeux.

« Elle se protège »

« Elle est exigeante envers elle-même et a la même exigence envers les autres. Elle fait ce qu’elle a envie de faire. Elle dit : Moi je n’ai encore rien gagné, laissez-moi travailler », décrypte encore Claude Michy. Sous ses ordres, le rythme peut être soutenu à Clairefontaine, avec certains jours, trois entraînements, dont le premier dès 7h.

Mais en interne, ses joueuses nuancent l’image caricaturale d’une Corinne Diacre stricte, voire dure. « Ce n’est pas quelqu’un de froid, elle aime rigoler et nous faire rire. Quand il y a des périodes où on est plus détente, elle est dans ce rôle de personne qui aime bien la vie », décrit la latérale Marion Torrent.

« Elle se protège beaucoup parce qu’elle sait aussi que si ça ne marche pas, elle va se faire étendre. Ce sont des postes difficiles, donc elle fait attention », complète Claude Michy. Surtout pour cette Coupe du monde, où elle est chargée d’offrir une première étoile à la France, pour donner un grand coup d’accélérateur au football féminin.

LQ/AFP