Contre la deuxième prévenue de l’assassinat de Porto Seguro (Brésil), Tania M., le parquet a requis 30 ans de réclusion, mercredi à Luxembourg. Lors du réquisitoire, le substitut principal du procureur d’État a employé le terme d’«exécution» pour décrire le crime. Quatre des cinq coups de feu auraient servi au tueur à gages à s’assurer de la mort de Henri Z.
Le 25 octobre 2011 au soir, Henri Z. (71 ans) était assassiné de cinq coups de feu dans la tête alors qu’il se trouvait avec son épouse en voyage de noces au Brésil.
À la barre, seule l’épouse de la victime, Brigitte D. (61 ans) est passée aux aveux. La deuxième prévenue, Tania M. (53 ans), a clamé jusqu’au bout son innocence. Or d’après le réquisitoire du parquet, les deux étaient bien impliquées dans l’assassinat. Et c’est Brigitte D. qui l’aurait planifié. « Brigitte D. avait l’intérêt le plus évident à tuer son mari », a ainsi souligné le substitut principal du procureur d’État, Robert Welter. « Mais sans la promesse d’argent, il ne se serait rien passé. »
Certes Brigitte D. a fini par avouer avoir participé au crime, mais pour Robert Welter, « l’aveu arrive à un moment où les carottes sont cuites . Et l’aveu ne diminue pas non plus la gravité des actes. »
Le parquet note par ailleurs que jusqu’au bout Brigitte D. a cherché à minimiser son rôle en tentant de considérer que ce se sont les autres qui ont tout fait. Pourtant, l’assassinat du 25 octobre 2011 « était au moins la troisième fois qu’elle voulait sa mort ». Pour rappel, après une première tentative d’assassinat dans les Vosges, Henri Z. avait été la cible d’une attaque sur la plage quatre jours avant d’être abattu.
Robert Welter ne pense toutefois pas que la deuxième prévenue, Tania M., ait été dans le coup dès le mariage de Brigitte D. et Henri Z. fin mai 2011 (comme l’a pourtant affirmé Brigitte D.). D’après un témoin, ce jour-là, Tania M. avait demandé à Brigitte D. ce qui se passerait s’il arrivait quelque chose à Henri Z. « Si Tania M. avait déjà planifié l’assassinat avant le mariage, elle savait ce qui se passerait. Et cette conversation n’aurait pas eu lieu. La question était inutile », remarque-t-il.
Ce n’est pas pour autant que le parquet croit en l’innocence de Tania M. À la barre, cette dernière a notamment déclaré que Brigitte D. a organisé l’assassinat au Brésil à l’aide de son fils Diego M. Or le représentant du parquet a du mal à imaginer que Brigitte D. ait pu organiser le crime avec Diego M. : « On ne contacte pas quelqu’un qu’on ne connaît pas sur le bout des doigts pour faire un assassinat. Il est plus logique que Tania M. prépare le terrain avec Diego M. avant que Brigitte D. s’occupe des détails. »
«C’est elle qui attiré Henri Z. au Brésil»
Le parquet reproche donc à Tania M. d’avoir fourni l’aide nécessaire afin que son fils Diego M. et Brigitte D. puissent perpétrer l’assassinat. Il rappelle par ailleurs qu’après la mort de Henri Z., Tania M. avait, en connaissance de cause, accompagné Brigitte D. à la banque pour retirer les 20 000 euros de la succession avant de les virer au Brésil. Le mobile de l’argent fonctionne, selon le parquet, également pour Tania M., car elle aurait eu tout le temps un besoin énorme d’argent pour ses enfants.
L’argument qu’au moment de l’assassinat Tania M. ne se trouvait plus au Brésil a également été battu en brèche. « Sa présence se justifiait juste pour l’aller , rappelle Robert Welter. Car c’est elle qui a attiré Henri Z. à Porto Seguro. »
Enfin, d’après le parquet, l’ensemble des faits montrent que l’assassinat a bel et bien été planifié depuis le Luxembourg. Il demande donc à la chambre criminelle de juger les deux prévenues. Contre Brigitte D. qui aurait eu le rôle prépondérant, il requiert la réclusion à vie et contre Tania M., « dont le rôle n’est pas moins négligeable », 30 ans de réclusion.
Lors de son dernier passage à la barre, Tania M. a une nouvelle fois clamé son innocence : « Je ne suis pas une criminelle. Je ne vais pas faire 30 ans pour un crime que je n’ai pas commis. » Elle a encore annoncé que son fils avait l’intention de faire une déclaration pour dire que c’est bien Brigitte D. qui lui a téléphoné pour organiser l’assassinat. Mais il ne viendrait pas au Grand-Duché.
La déclaration de Brigitte D., quant à elle, était plus lapidaire : « Je regrette beaucoup », a-t-elle lâché avant d’ajouter avec une voix à peine audible : « Tania n’est pas innocente non plus .»
Le 8 juillet, la neuvième chambre criminelle rendra son jugement.
Fabienne Armborst