Des boîtes de petits pois par centaines, du thon ou du chocolat en poudre pour un régiment… Rares sont les bénéficiaires à le savoir mais, aux Restos du Cœur, un quart des denrées alimentaires distribuées sont financées par l’Union européenne.
Dans l’immense entrepôt des Restos du Cœur du Bas-Rhin, installé sur 2200 m² dans une zone industrielle du sud de Strasbourg, toute une rangée de palettes montant jusqu’au plafond regroupe des marchandises achetées grâce au Fonds européen d’aide aux plus démunis (FEAD).
Du sucre, des boîtes de raviolis, des salades de fruits en conserve, mais aussi des escalopes de poulet congelées et du beurre, stockés dans une chambre froide: une vingtaine de produits de première nécessité a été achetée cette année grâce au FEAD, après un appel d’offres national.
« Notre association distribue gratuitement des denrées alimentaires dont l’achat est financé par l’Union européenne », explique une affichette accompagnée d’un drapeau européen, au bout du rayonnage.
Très professionnels, des bénévoles s’activent, certains au volant de chariots de manutention. Fernand Koch, responsable de l’approvisionnement, prépare une commande pour le restaurant « La Fringale » qui accueille, près de la gare de Strasbourg, les personnes en errance.
Plus loin, des bénévoles trient des produits beaucoup plus variés, issus de la collecte organisée dans les supermarchés. Un paquet de madeleines côtoie du lait infantile et une brique de soupe forestière.
Autant que les concerts des Enfoirés
« On complète (les produits achetés grâce au FEAD) avec la collecte qui permet d’avoir des produits variés, car les gens donnent ce qui leur faire plaisir », explique Daniel Belletier, président des Restos du Bas-Rhin. « C’est essentiel, ce financement européen. On se bat pour que ce fonds perdure », insiste-t-il, surplombé par un portrait de Coluche en noir en blanc.
Avec environ 25 millions d’euros par an, les Restos du Cœur sont les premiers bénéficiaires français du FEAD, que touchent également la Fédération Française des Banques Alimentaires, le Secours Populaire et la Croix-Rouge.
Sur les 130 millions de repas distribués par l’association chaque année, plus d’un quart est financé par ce fonds mis en place pour la période 2014-2020, selon une stratégie qui vise à faire sortir de la pauvreté 20 millions d’Européens.
Pourtant, l’inquiétude se mêle à la gratitude à l’égard de la Commission européenne : le FEAD pourrait être intégré à un fonds social plus large dont seulement 2% seraient consacrés à l’aide alimentaire, soit environ 2 milliards d’euros, contre 3,8 milliards aujourd’hui.
« On perdrait presque ce que rapportent les concerts des Enfoirés, ce n’est pas facile à compenser ! », s’alarme Daniel Belletier.
860 000 bénéficiaires
« Les pouvoirs publics français nous ont dit qu’au cas où le montant du FEAD diminuerait, ils apporteraient la différence. Sauf que ce serait un engagement budgétaire annuel qui pourrait être remis en cause chaque année, alors que le budget européen donne une sécurité sur six ans », complète le président des Restos du Cœur Patrice Blanc.
A quelques centaines de mètres de l’entrepôt strasbourgeois, au centre de distribution des Restos dans le quartier de la Meinau, familles avec poussettes, couples âgés et personnes isolées peuvent venir chercher de la nourriture une fois par semaine.
Des choux, des asperges, des crèmes au caramel, des conserves, du lait, du pain… les cabas se remplissent vite. Si les bénéficiaires ne s’attardent pas à contempler l’affichette mentionnant le FEAD au-dessus des rayonnages, pour tous, cette aide alimentaire est essentielle.
Au cours de leur campagne 2017-2018, les Restos du Cœur ont accueilli 860 000 personnes, leur proposant aide alimentaire mais aussi accompagnement pour la recherche d’emploi, assistance juridique ou encore soutien scolaire.
LQ/AFP