A l’affiche de « Sensiblement Viril », Alex Ramirès propose un one-man-show détonnant. Avec une énergie sans pareille, il pose un regard aiguisé sur les clichés de notre société, les dépasse et mieux, s’en amuse.
Alors qu’il cartonne sur scène et sur le net, il revient sur son parcours, l’occasion de se rappeler ses premières scènes de Lyon à Paris, en passant par le Showtime au Luxembourg. Il évoque aussi son actu et ses projets. Rencontre avec l’un des humoristes les plus prometteurs de sa génération.
Comment est née cette passion pour le spectacle ?
J’ai toujours adoré ça et c’est un atelier-théâtre à l’âge de neuf ans qui m’a vraiment permis de m’exprimer, d’écrire mes propres sketches et de faire rire. Quand on arrive à cela, on a vite envie de le faire toute sa vie.
Vous avez grandi à Lyon. Quelles y ont été vos premières expériences marquantes ?
Cela a été des cours de théâtre d’improvisation avec la Ligue d’Improvisation Lyonnaise. Ce sont pour moi les meilleurs. J’ai ensuite pris des cours de café-théâtre, là où Florence Foresti a commencé, au « Nombril du Monde ». On apprenait des textes qui n’étaient pas les nôtres puis on les jouait pendant deux mois.
Quelle a été votre motivation pour monter à Paris ?
A un moment, on a envie de croquer la vie, d’avancer et d’aller plus loin. Professionnellement, c’est à Paris que tout se passe dans ce domaine. J’avais envie de me tester et quand je suis arrivé ici en 2015, c’était vraiment le provincial qui monte à la capitale avec des rêves plein la tête.
Vous présentez votre troisième one-man-show. Pourquoi ce titre « Sensiblement Viril » ?
Ce spectacle est toute en contradictions. Je m’y définis en commençant par ce que je ne suis pas. Je ne me reconnais pas dans les mecs sensibles, ni dans ceux très virils et je pense être un peu des deux. J’aime cette oxymore de « sensiblement viril » qui augure que cela va partir dans plusieurs sens.
Peut-on y voir une forme d’engagement ?
Oui mais c’est surtout dans la réception. Par leur propos ou leur fond, des observations anodines pour moi vont prendre un écho auprès du public. Il peut ainsi s’interroger sur certains stéréotypes et c’est vraiment intéressant.
Vous confrontez souvent les situations. Est-ce plus difficile de faire son coming-out en province qu’à Paris par exemple ?
Je ne sais pas. Il y a eu le lot de petits tracas mais cela a été plutôt facile pour moi. Je n’ai pas envie de faire passer le message que c’est plus simple à Paris. On découvre entre guillemets une plus grande communauté mais cela ne veut pas dire qu’elle est exempte de clichés. J’ai envie que les choses se passent facilement partout.
Est-ce un sujet compliqué à aborder dans un spectacle ?
Il ne l’est pas plus qu’un autre. Il y a des choses qui le sont davantage. J’avais un axe qui me plaisait et je pense que l’on peut parler de tout tant que c’est drôle et bien fait. Je suis content d’ailleurs de la façon dont j’aborde le coming-out dans ce sketch. Il faut se moquer des clichés et non pas avec.
Vous parliez de Florence Foresti. Quelles sont justement vos références ?
Foresti, 100% déjà, c’est pour moi le subtil mélange entre personnel, drôle, physique, texte, populaire et engagé. Muriel Robin me passionne. Tout ce qu’elle a écrit avec Palmade aussi me fait beaucoup rire.
Dans la nouvelle génération, peut-on trouver des parallèles entre votre humour et celui de Tristan Lopin, notamment au niveau de vos parodies ?
C’est un pote et en plus, c’est mon voisin. On s’entend très bien, il est même intervenu en guest sur certaines de mes vidéos. Nous faisons tous les deux des parodies en effet car cela nous plaît. Nous aimons tous les deux la pop-culture. Nous faisons sinon des choses très différentes. Son spectacle parle beaucoup d’amour, il y a un côté beaucoup plus tendre que dans le mien. Mon spectacle est plus dur sur le temps qui passe.
Vos parodies « low-cost » de films et de séries font des millions de vues sur le net. Comment sont-elles nées ?
Au départ, ce sont des envies personnelles. A part celle de James Bond dont j’ai écrit le scénario, les parodies « low-cost » naissent de discussions avec ma réalisatrice Léa Rouaud. Nous choisissons ensemble des extraits de films ou des génériques de films qui nous plaisent. Ce sont des hommages pour nous. Il faut que le sujet nous parle. « Star Wars » pourrait faire des vues mais cela ne nous dit rien. Là encore, nous sommes très pop-culture, les Disney, les séries et les films de notre enfance. Sur le même concept que la parodie de James Bond, j’en ai écrit une autre et elle sort prochainement.
Quelle est l’importance du net et des réseaux sociaux dans votre communication ?
Je me suis vite rendu compte que c’était un outil gratuit qu’il fallait utiliser. Cela ne suffit pas de juste avoir un bon spectacle. C’est clair que si toutes mes dates étaient blindées six mois en avance, je m’en occuperais peut-être moins car ce qui m’intéresse, c’est la scène ou la fiction pure. Mais par cette contrainte de produire quelque chose pour le net, on a une liberté qui est magique car on peut faire ce que l’on veut. Je me suis constitué une belle équipe de tournage, nous sommes devenus des amis et on s’éclate vraiment à faire ces parodies.
Un mot sur le Showtime d’Esch-sur-Alzette où vous avez joué vos premiers spectacles ?
J’y ai joué plusieurs fois en effet. Ils m’ont fait confiance il y a très longtemps puis j’y suis retourné il y a plus d’un an. Le Showtime était un lieu atypique, les gens mangeaient, on jouait à 22h30 et on savait que la soirée allait de fait être exceptionnelle. Tous les codes étaient décalés et j’ai vraiment adoré cet endroit. J’y ai de très bons souvenirs.
Comment avez-vous appris la disparition de ce lieu en effet atypique ?
Je les ai croisés en Belgique (les dirigeants, NDLR), au Festival « Le Voo Rire » avec les Frères Taloche. Je leur ai demandé comment ça allait et ils m’ont montré la vidéo. Je ne savais pas ce qui c’était passé et cela m’a fait un choc que tout soit parti en fumée. Je leur ai suggéré l’idée de faire une soirée avec tous les artistes qui sont venus. On pourrait remplir une grande salle et les fonds seraient reversés à la reconstruction du lieu.
Quels sont vos projets parallèlement à votre spectacle actuel ?
J’aimerais beaucoup écrire un format court pour ensuite aller le proposer. L’idée et le concept sont posés sur le papier mais je dois tirer le fil maintenant. Dans l’absolu, j’aimerais me lancer dans des projets de réalisations, et même de fictions.
Nikolas Lenoir