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Élections sociales et démocratie

Lors des législatives d’octobre, 232 000 Luxembourgeois étaient appelés aux urnes. Soit moins de la moitié des 526 476 salariés invités à désigner d’ici mardi prochain leurs représentants à la Chambre des salariés (CSL) et leurs délégués du personnel dans les entreprises. Ce nombre record fait de ce scrutin le plus grand jamais tenu au Grand-Duché. La différence du nombre de votants avec les élections politiques tient au fait que tout salarié est autorisé à voter, même s’il est résident étranger ou frontalier (ces derniers sont quelque 200 000).

Ce scrutin donne voie au chapitre à tous ceux qui, par leur travail, contribuent à la richesse du pays. Encore faut-il qu’ils votent, car, au contraire des élections politiques, le vote n’est pas obligatoire. Et il est plutôt faible chez les frontaliers et les jeunes. C’est dommage, car même si ces élections limitent aux seules questions du travail la participation des votants à la vie démocratique, elles comblent partiellement le déficit de représentativité dans un pays dont près de la moitié de la population est étrangère et 40% des salariés du privé sont frontaliers.

Le premier objectif de ces élections est cependant d’élire ceux qui défendront pendant cinq ans les intérêts des salariés dans les entreprises (délégués) et au niveau législatif (représentants à la CSL). D’une autre manière, c’est aussi la question démocratique qui est posée par la prise en compte de la parole des salariés face aux patrons et actionnaires qui se considèrent souvent seuls pilotes légitimes de leur entreprise. Les conventions collectives ou le droit du travail contribuent à l’équilibre, mais n’y suffisent pas. Le sujet de la cogestion des entreprises par l’attribution aux salariés de sièges dans les conseils d’administration gagne en acuité, alors que le pouvoir économique supplante peu à peu celui du politique qui se défait toujours plus de ses missions de service public. Au Luxembourg, seules les sociétés de 1 000 employés et plus sont tenues de réserver aux salariés des sièges dans leur conseil d’administration. En Allemagne, le seuil est fixé à 500 salariés et en Suède à 25! La réussite de ces pays démontre que le partage des responsabilités avec les salariés n’est pas seulement gage de démocratie, mais est aussi garantie de réussite économique.

Fabien Grasser