Samedi soir à Bruxelles, le cinéma belge était en fête avec sa 9e cérémonie des Magritte. « Nos batailles » de Guillaume Senez et « Girl » de Lukas Dhont se sont taillé la part du lion. Retour sur une soirée où la bonne humeur était au rendez-vous, malgré des déceptions.
C’est bien connu, le Belge a un humour décalé et de l’autodérision. En débutant la soirée par la Danse des canards, suscitant l’hilarité de la salle, c’était un pari osé mais réussi. Le ton était donné, cette neuvième édition ne serait pas comme les autres.
Mais pour que la mayonnaise puisse prendre, il fallait un maître de cérémonie de grand talent. Un maître qui connait bien la Belgique tout en ayant assez de recul pour tacler les invités de renom comme la ministre de la Culture ou le prince Laurent pour ne citer qu’eux. Dès lors, qui mieux que l’humoriste Alex Vizorek pour ce rôle si souvent casse gueule ?
« C’était un rôle difficile qui m’a pris beaucoup de temps à préparer. Mais j’avais envie de le faire, de relever le défi », nous a-t-il confié avant d’ajouter : « Je l’ai fait une fois et ne comptez pas sur moi pour l’endosser à nouveau l’année prochaine car je n’aurai pas le temps. Je prépare un nouveau spectacle et cela prend aussi beaucoup de temps. » Quel dommage !
Des choix difficiles
Cette année, la distribution des trophées a été répartie entre plusieurs films, à l’inverse de l’an dernier où Philippe Van Leeuw avait fait carton plein avec Une famille Syrienne. Avec 5 trophées sur 7 nominations, on peut dire que mathématiquement parlant Guillaume Senez avec Nos batailles est le grand gagnant de cette 9e édition (Meilleur film, meilleur réalisateur, meilleure actrice dans un second rôle, meilleur espoir féminin, meilleur montage).
Toutefois, Girl de Lukas Dhont, qui en a décroché 4 sur 9 espérés, repart avec des Magritte de prestige comme celui du meilleur film flamand, meilleur scénario original, meilleur acteur (Victor Polster) et meilleur acteur dans un second rôle (Arieh Worthalter).
Cela expliquant la difficulté des votants à marquer la différence entre ces deux œuvres qui ont fait les beaux jours au dernier Festival de Cannes et que nous retrouverons en lice pour le César du meilleur film étranger le 22 février prochain. Girl raconte l’histoire de Lara qui rêve de devenir danseuse étoile. Un rêve qui devient de plus en plus compliqué à accomplir car Lara est née garçon. Nos batailles, ce sont celles d’Olivier qui doit se partager entre ses responsabilités professionnelles, ses enfants et la vie de famille. Une bataille quotidienne depuis que sa femme l’a quitté sans raison apparente.
De quoi être déçu
Avec 4 nominations, Bye, bye Germany coproduit par Samsa Film, ne s’est distingué qu’à travers le Magritte du meilleur costume. Il y a de quoi être déçu. Bitter Flowers d’Olivier Meys décroche le Magritte du meilleur premier film alors qu’il était en lice dans quatre catégories dont meilleur film et meilleur réalisateur. Quant à Laissez bronzer les cadavres, ce sont les Magritte techniques (meilleures images, meilleur son, meilleurs décors) qui lui ont été attribués.
En revanche, Tueurs de François Troukens et Jean-François Hensgens, nommé neuf fois, repart avec un seul trophée, celui de la meilleure actrice pour Lubna Azabal qui obtient du même coup le troisième Magritte de sa carrière. Pourtant en Belgique, elle ne semble pas vraiment décoller. « Je ne comprends pas pourquoi je ne suis pas sollicitée plus souvent pour faire des films en Belgique », regrette-t-elle. « Je tourne souvent en France, je tourne avec de grands réalisateurs dans le monde mais si rarement en Belgique. Nul n’est prophète en son pays », dit-elle tout en serrant le Magritte entre ses mains.
Le Magritte d’honneur a été attribué à Raoul Servais, premier réalisateur belge à avoir obtenu une Palme d’or à Cannes. C’était en 1979, pour le court métrage Harpya. Quant à celui du meilleur film étranger en coproduction, il a été décerné à Terry Gilliam pour L’homme qui tua Don Quichotte.
De notre collaborateur Thibaut Demeyer