«Programme des belles paroles», «catalogue de mesures sans fil rouge» : le principal parti de l’opposition, le CSV, n’a pas mâché ses mots envers l’accord de coalition.
Déterminée, incisive, mais aussi ironique lorsqu’elle lance «bonne chance à vous Monsieur Bettel ainsi qu’à vos ministres !», Martine Hansen ne s’est pas fait prier pour recadrer la majorité en lui rappelant que son «style direct» était dû au «sang de l’Oesling» qui coule dans ses veines. Elle s’est d’ailleurs encore moins fait prier pour s’en prendre au LSAP qui, lors de son congrès destiné à avaliser l’accord de coalition, avait taxé le CSV de «parti de prêtres».
Alors quand il s’agit de résumer les 246 pages du programme gouvernemental, celle qui incarne le nouveau visage de l’opposition au Parlement n’hésite pas un instant à évoquer «un programme de belles paroles», un «catalogue de mesures sans fil rouge qui les lie entre elles», voire «le programme du vide politique» ou «un programme sans chiffres en termes de coûts».
«Aucune vision globale pour l’avenir»
Et pour bien signifier son nouveau rôle au chef du gouvernement, la cheffe de la fraction chrétienne-sociale a soigneusement repris le slogan électoral du Parti démocratique du Premier ministre («Zukunft op Lëtzebuergesch»/«L’avenir en luxembourgeois»), en estimant que le DP n’avait «aucune vision globale de l’avenir».
Pour argumenter son propos, Martine Hansen a commencé son travail «d’opposition constructive et critique» en signalant que le programme gouvernemental n’abordait aucunement la croissance économique d’un point de vue qualitatif, notion qui, selon elle, aurait dû se poser en tant que fil conducteur tout au long des 246 pages. «Premièrement, on ne parle que de croissance économique quantitative, liée au PIB, dans ce programme. Deuxièmement, on se focalise sur les nouveaux avantages d’ordre pécuniaire que percevront les citoyens… mais il faut qu’un programme gouvernemental ait une approche plus large !», s’est-elle exclamée.
Avant, pour la première femme cheffe de la fraction CSV de l’histoire, de s’attaquer à plusieurs mesures bien précises. À commencer par celle de la gratuité des transports publics (à partir de 2020) : «Monsieur le Premier ministre est content que toute la planète parle du Grand-Duché à cause de cette annonce. Mais comment sera donc financée cette mesure ? Eh bien, elle le sera par la réduction des frais de déplacement forfaitaires qui est annoncée dans le programme !», a-t-elle lancé.
Transports et tampons, un «lien improbable»
La banderille aura eu pour effet de provoquant une réaction immédiate et indignée du ministre de la Mobilité, François Bausch, qui a tout aussi vivement réfuté ce propos : «Cela fait une semaine que vous dites des inexactitudes (NDLR : dans les médias). La gratuité des transports publics ne sera pas financée de cette façon !», a-t-il rétorqué.
Mais le sang «nordique» de Martine Hansen n’a fait qu’un tour et la réponse à… la réponse a fusé : «Monsieur Bausch, si les deux mesures figurent dans le même paragraphe, ce n’est certainement pas parce que la réduction des frais de déplacement forfaitaires servira à financer la baisse de la TVA sur les tampons hygiéniques ! Ce lien est improbable !»
Outre cet échange, qui augure des joutes verbales «de choc», entre majorité et opposition, le CSV mené par Martine Hansen aura encore tapé sur les politiques éducatives menées jusque-là par le ministre Claude Meisch (DP), sur «le peu de courage affiché» dans le programme gouvernemental du ministre de l’Énergie, Claude Turmes, par rapport au tourisme à la pompe et aux mesures, jugées «vagues», relatives au diesel, ou encore sur l’annonce de la légalisation – ou de la dépénalisation – du cannabis récréatif.
Claude Damiani