« Ordre et progrès » : c’est la fameuse devise du Brésil, inscrite sur le drapeau national et inspirée de la pensée du philosophe français Auguste Comte, le positivisme.
Si les deux mots ne sont, a priori, pas les premiers auxquels tout un chacun serait tenté de penser en songeant au Brésil, ils le sont probablement encore moins aujourd’hui après l’élection de l’homme politique d’extrême droite Jair Bolsonaro au poste de président. Car même s’il se pose comme l’homme à poigne qui saura serrer la vis face à la violence qui gangrène le Brésil, notamment dans les tristement célèbres favelas, l’entre-deux-tours présidentiel a montré que ce nostalgique de la dictature militaire restera sur sa ligne raciste et homophobe.
En effet, après qu’il a mené une campagne électorale émaillée de propos agressifs et vulgaires, qui ont indigné une grande partie des Noirs, des femmes et des membres de la communauté LGBT, cet entre-deux-tours s’est manifesté par une véritable «libération» des actes violents contre certaines minorités, sans qu’ils soient réprimés et encore moins condamnés par celui qui est le nouvel homme fort d’Amérique du Sud. Tellement fort d’ailleurs qu’il a déjà le soutien de Marine Le Pen, alors que Matteo Salvini espère déjà l’extradition de l’ancien militant d’extrême gauche Cesare Battisti, réfugié au Brésil, mais condamné pour assassinat en Italie.
Archi soutenu par les Églises évangéliques, dont les fidèles, ultraconservateurs, concentrent un tiers de la population, Jair Bolsonaro est présenté comme «le président des riches», car ultralibéral (d’un point de vue économique) et parce que les plus riches ont massivement voté pour lui, mais au Brésil il n’y a certainement pas 55% de riches… loin de là !
D’où cette interrogation : que fera Bolsonaro des pauvres et des favelas, lui qui a été très vague sur ce sujet durant la campagne ? L’avenir le dira, mais le Brésil semble plus que jamais en contradiction avec sa devise nationale. Comme le disait le baron de Rio Branco, ancien ministre des Affaires étrangères (1902-1912) : «Il n’y a que deux choses bien organisées au Brésil : le désordre et le carnaval…»
Claude Damiani