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Luxembourg : les moyens d’augmenter le salaire minimum


Une augmentation est possible, selon Muriel Bouchet, économiste à la Fondation Idéa, mais il faut éviter l'option d'une mesure sèche (photo : Isabella Finzi).

Selon une publication d’un économiste de la Fondation Idea, une augmentation de 100 euros du salaire social minimum net non qualifié est possible.

La question de l’augmentation du salaire social minimum (SSM) avait trouvé une place dans les programmes électoraux. Les partis qui étaient représentés dans la Chambre des députés sortante considéraient qu’il fallait donner «un coup de pouce» au salaire social minimum. Depuis le 1er août, ce dernier est de 2 048 euros brut par mois pour un salarié non qualifié et de 2 458,25 euros pour une personne qualifiée. En fin de semaine dernière, Muriel Bouchet, économiste à la Fondation Idea, a publié un article sur le blog du laboratoire d’idées intitulé : «Salaire minimum : vers un « coup de pouce » de 100 euros ?». Décrivant les propositions énoncées par les partis en lice pour la Chambre, dont celle du LSAP qui affirmait vouloir augmenter le salaire social minimum de 100 euros dès le 1er janvier 2019, l’économiste soutient qu’une hausse du SSM «en tant que telle» semble périlleuse à divers égards.
Interrogée par nos soins lundi, Muriel Bouchet nous a assuré qu’une augmentation sèche d’une centaine d’euros de ce salaire brut pénaliserait les petites entreprises comme celles de la distribution et de l’Horeca, par exemple. «Ça va pénaliser l’emploi des personnes les moins qualifiées, ça va précipiter les personnes les moins qualifiées dans le sous-emploi.» «De manière générale, écrit-il, c’est bien le salaire net qui importe à un salarié, qui se soucie a priori peu de savoir si une augmentation de 100 euros par mois provient d’un accroissement du coût des entreprises ou d’ajustements fiscaux.»

L’index fin 2019 ?

Dans son texte, l’économiste dit se concentrer sur une hausse de 100 euros par mois du salaire social minimum net, «d’ici la fin 2019». D’après le «plus récent» bulletin de la Banque centrale du Luxembourg, une tranche indiciaire devrait tomber vers la «toute fin de l’année 2019 – ou du moins au tout début de 2020». Muriel Bouchet estime que cet «ajustement» «permettrait d’honorer une partie des 100 euros». La tranche indiciaire rapporterait 43 euros au bénéficiaire du SSM. «L’objectif de progression du SSM net hors indexation s’établit dès lors à 57 euros (soit 100 euros moins 43 euros)», complète-t-il.
D’autres pistes permettraient d’atteindre les 100 euros nets par mois. Muriel Bouchet évoque une révision du calcul de la contribution de l’assurance dépendance. Actuellement, en la matière, le salaire minimum est exonéré à hauteur d’un quart de son montant, ce qui aboutit à une contribution de 22 euros. Idea propose d’exonérer totalement le salaire minimum, tout en faisant passer le taux de la contribution dépendance de 1,4 % à 2 %. Une personne touchant le SSM «payerait (donc) 2 % de zéro. Elle ne payerait plus de cotisation dépendance mais gagnerait 22 euros». Cette hausse «se traduirait certes en parallèle par une réduction du pouvoir d’achat des salariés les plus aisés». Cependant, la perte serait «assez marginale et elle ne serait de mise qu’à partir d’un salaire mensuel de 5 700 euros».

Une gratuité des transports coûteuse

Selon l’auteur du post, le calcul est fait pour qu’il n’y ait pas d’impact «sur le budget de l’État et celui de la Sécurité sociale plus exactement». En gros, «c’est le net qui va augmenter, le brut ne changera pas». Et le coût pour l’entreprise ne bougera pas non plus.
La deuxième piste pour atteindre les fameux 100 euros d’augmentation étant une augmentation du crédit d’impôt pour les salariés (CIS) de 600 à 1 000 euros pour les bénéficiaires du SSM et touchant jusqu’à 30 000 euros par an. Cette hausse «favoriserait en effet le passage du sous-emploi à l’emploi, puisque le CIS se limite aux périodes d’activités salariées», écrit Muriel Bouchet. Pour lui, cette hausse de 100 euros est faisable. «Les facteurs politiques pourraient empêcher» sa réalisation. Pour les entreprises, «il n’y a pas de changements additionnels».
Citant la gratuité des transports, l’économiste de la Fondation Idea pense qu’elle serait «quasiment aussi onéreuse que le rehaussement sélectif du crédit d’impôt, avec une facture de 65 millions d’euros par an». On ignore encore si la future coalition formée après le scrutin de dimanche appliquera cette hausse du salaire social minimum.

Aude Forestier