L’armée syrienne a abattu au large de la Syrie un avion de son indéfectible allié russe avec 15 militaires à bord, Moscou faisant dans un premier temps porter la responsabilité à Israël, avant d’évoquer des « circonstances accidentelles tragiques ».
Cet incident inédit est survenu alors que la Russie et la Turquie ont annoncé un accord sur la province d’Idleb, dernier grand bastion insurgé dans le nord-ouest syrien, où une « zone démilitarisée » doit être instaurée, éloignant à court terme la perspective d’une offensive du régime. De 15-20 km de large, elle devra servir de zone-tampon entre les territoires insurgés et les zones gouvernementales alentours. Elle sera contrôlée par les forces turques et la police militaire russe et toutes les armes lourdes devront en avoir été retirées d’ici au 10 octobre.
Lundi soir, l’Illiouchine-20 russe a été abattu, par erreur selon Moscou, par la défense anti-aérienne syrienne. Celle-ci avait ouvert le feu pour intercepter des missiles israéliens, selon la même source, visant des dépôts de munitions dans la province de Lattaquié, un bastion du président Bachar al-Assad. Des frappes qui ont fait deux morts et au moins dix blessés, dont sept soldats syriens.
L’incident de l’avion russe abattu est le plus grave entre les deux alliés depuis que Moscou est intervenu militairement fin 2015 en Syrie pour épauler le régime de Damas, alors affaibli face aux rebelles et aux jihadistes. Le quadrimoteur à hélices, généralement utilisé pour des missions de surveillance, a été « abattu par un système de missiles S-200 » de l’armée syrienne, tuant les 15 membres d’équipage, a indiqué le ministère russe de la Défense.
D’abord Israël puis la France incriminés
Toutefois, l’armée russe a dirigé dans un premier temps sa colère contre Israël, jugé responsable du drame en raison des tirs de missiles sur Lattaquié, imputés par Moscou à quatre F-16 israéliens. « Les pilotes israéliens, en se couvrant avec l’avion russe, l’ont placé sous le feu de la défense antiaérienne syrienne », a asséné le ministère russe. « Nous considérons hostiles ces provocations de la part d’Israël » et « nous nous réservons le droit de répondre de manière adéquate », a-t-il averti, alors que l’ambassadeur d’Israël en Russie a été convoqué. Le président russe Vladimir Poutine a ensuite parlé d’ « un enchaînement de circonstances accidentelles tragiques ».
L’armée israélienne a de son côté contesté que son aviation s’était servie de l’appareil russe comme couverture pour échapper aux tirs syriens. Dans un communiqué, elle a affirmé que ses appareils avaient attaqué un site de l’armée syrienne d’où des systèmes entrant dans la fabrication d’armes étaient en passe d’être livrés pour le compte de l’Iran au mouvement chiite libanais Hezbollah, bête noire d’Israël. « Israël exprime sa tristesse devant la mort des membres d’équipage de l’avion russe », a déclaré l’armée. « Israël tient le régime d’Assad, dont l’armée a abattu l’avion russe, pour entièrement responsable de ces incidents ».
Ces derniers mois, Israël a multiplié les frappes en Syrie contre le régime ou son allié iranien, l’État hébreu martelant qu’il ne permettrait pas à l’Iran de se servir de la Syrie comme tête de pont contre lui.
Le ministère russe de la Défense avait également affirmé que des missiles avaient été tirés par la frégate française « Auvergne », qui croisait dans les parages. « La frégate française L’Auvergne n’a effectué aucun tir la nuit dernière », a répondu le porte-parole de l’état-major français.
LQ/AFP