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Russie : la loi sur les ONG « indésirables » inquiète


Le texte a été voté par les deux chambres du parlement en moins d'une semaine et promulgué samedi soir par Vladimir Poutine. (Photo AFP)

Les ONG étrangères actives en Russie, et jugées « indésirables » par le pouvoir, peuvent désormais être interdites en vertu d’une nouvelle loi dénoncée par Bruxelles, Washington et les défenseurs des droits de l’Homme.

La loi en question est vue comme une « étape préoccupante » dans la répression contre les voix critiques. Voté par les deux chambres du parlement en moins d’une semaine, et promulgué samedi soir par Vladimir Poutine, ce texte permet de fermer sans décision de justice une organisation étrangère menaçant la « sécurité nationale » ou les « fondements constitutionnels » de la Russie.

Il permet aussi de bloquer leurs comptes bancaires ou leur accès aux médias. Leurs employés pourront être poursuivis, risquant jusqu’à six ans de prison, ou pourront se voir interdire d’entrée sur le territoire russe. Les organisations russes qu’elles financent devront « rendre compte » de leurs actes.

L’Union européenne a dénoncé dimanche une « étape préoccupante dans une série de restrictions sur la société civile, l’indépendance des médias et l’opposition politique ». Quelques heures plus tôt, les États-Unis s’étaient déjà dits « profondément troublés ». Il s’agit d’un « exemple supplémentaire de la répression croissante des voix indépendantes par le gouvernement russe ainsi que de (ses) mesures intentionnelles pour isoler le peuple russe du reste du monde », a critiqué dans un communiqué la porte-parole adjointe du département d’État, Marie Harf.

Ce nouveau texte vient en effet compléter une autre loi de 2012, déjà très controversée : elle oblige les ONG, bénéficiaires d’un financement étranger et avec une « activité politique », à s’enregistrer en tant qu' »agent de l’étranger » et à s’afficher en tant que tel dans toute communication ou activité publique. Cette dénomination, appliquée aux opposants pendant l’époque stalinienne ou dans les années 1970-80 contre les dissidents, a depuis été appliquée à plusieurs organisations de défense des droits de l’Homme comme Memorial, le Centre Sakharov ou encore à l’organisation anticorruption Transparency International.

Les députés ont invoqué le besoin d’arrêter «les organisations destructrices» travaillant en Russie, où elles peuvent menacer «les valeurs de l’État russe» et fomenter des «révolutions de couleur», du nom donné aux mouvements pro-occidentaux ayant secoué plusieurs ex-républiques soviétiques au cours des dernières années.

L’OSCE s’est inquiétée d’une «formulation vague et imprécise» qui «impose des restrictions sérieuses sur un large éventail de droits démocratiques importants, dont la liberté d’expression et la liberté de la presse». Pour ses détracteurs, ce manque de précision permet en outre aux autorités d’également cibler les entreprises étrangères. Le Parquet pourra en outre imposer le qualificatif d’«indésirable» à une organisation sans avoir besoin d’une décision de justice.

Le Quotidien/AFP