Le premier syndicat de « travailleuses du sexe » d’Espagne a réclamé vendredi « les mêmes droits » que le reste des travailleurs et critiqué durement le gouvernement socialiste qui veut faire annuler sa récente création.
« Les travailleuses du sexe méritent les mêmes droits au travail que le reste de la société espagnole, rien de plus. Mais nous n’entendons pas en avoir moins non plus », a affirmé Conxa Borrell, secrétaire générale du syndicat Otras (Organisation des travailleuses du sexe). Lors d’une conférence de presse improvisée à Barcelone, elle a réclamé la démission du gouvernement de Pedro Sanchez, qui a annoncé jeudi son intention de contester la création du syndicat pourtant validée début août par sa propre administration.
L’abolition de la prostitution, que défend l’exécutif socialiste, cache « une haine viscérale envers les travailleurs du sexe », a assuré Conxa Borrell. « Peut-être que certains, confortablement installés au gouvernement, pensent, derrière le voile immaculé du féminisme blanc, hétérosexuel et bourgeois, que demander des droits pour un secteur appauvri et stigmatisé est une atrocité », a-t-elle argumenté. « Pour nous, cependant, ce n’est que justice », a-t-elle dit, ajoutant que pour les travailleuses du sexe, avoir des droits comme un contrat de travail, un salaire fixe, une couverture santé, des congés ou une retraite est « une utopie ».
Prostitution tolérée, sans cadre
Jeudi, la presse a révélé que la Direction générale du Travail, dépendant du ministère du Travail, avait autorisé la constitution du syndicat Otras, né d’une association barcelonaise de travailleurs du sexe nommée Aprosex. Le gouvernement de Pedro Sanchez, pour qui le féminisme est un grand cheval de bataille, a affiché sa contrariété. « Ils m’ont mis un but en pleine lucarne », a réagi jeudi la ministre du Travail Magdalena Valerio, annonçant qu’elle allait tenter de faire annuler la création du syndicat.
« Ce gouvernement n’accepte d’aucune manière qu’il y ait un syndicat de travailleuses du sexe », a martelé vendredi la porte-parole du gouvernement Isabel Celaa, confirmant que les services juridiques du gouvernement s’attelaient à contester sa création. « Cela ne semble pas difficile », a-t-elle assuré.
En Europe, la prostitution est légale notamment aux Pays-Bas, en Suisse, en Autriche et en Allemagne. En Espagne, elle n’est ni légale ni illégale, simplement tolérée, et les très nombreuses maisons closes sont autorisées.
LQ/AFP