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Najat Vallaud-Belkacem : sourire et self-control pour traverser la tempête


La jeune ministre française n'a pas que son sourire pour affronter la tempête des critiques sur la réforme du collège. (photo AFP)

Issue d’un milieu modeste et produit de l’élitisme républicain que les détracteurs de la réforme du collège l’accusent de menacer, la jeune ministre française de l’Education, Najat Vallaud-Belkacem, affronte sa première tempête, sans se départir de son « self-control » et de son sourire désarmant.

Cette Franco-Marocaine de 37 ans, première femme à occuper ce poste à haut risque, est arrivée en France, à Amiens, à l’âge de quatre ans. A ceux qui affirment qu’elle oeuvre « au nivellement de l’école par le bas », cette diplômée de Sciences-Po réplique vouloir offrir « l’excellence pour tous ».

« Elle a fait son baptême du feu de la contestation, c’est un grand classique quand on est ministre de l’Education », dit Christian Chevalier du syndicat SE-Unsa, favorable à la réforme. « Elle a tenu un cap lisible, on n’était pas dans la provocation », estime-t-il. Aux antipodes de certains prédécesseurs dont les formules-choc ont échaudé les enseignants, comme Claude Allègre sur le mammouth ou Xavier Darcos sur les couches-culottes.

Najat Vallaud-Belkacem a « un style extrêmement pondéré, non agressif », juge le sociologue François Dubet, spécialiste du collège. Les opposants à sa réforme, comme le Snes, premier syndicat du secondaire, fustigent au contraire un dialogue qu’ils estiment de façade, quand les textes officiels sont publiés au JO dès le lendemain d’une grève.

La jeune femme, ancienne protégée du maire de Lyon, Gérard Collomb, a connu une ascension fulgurante depuis son adhésion au PS après le choc du 21 avril 2002. Figure montante du gouvernement –elle y a été porte-parole, ministre des Droits des femmes, de la Jeunesse, de la Ville et des Sports–, elle n’a pas d’expertise en éducation lorsqu’elle remplace au pied levé le frondeur Benoît Hamon cinq jours avant la rentrée 2014.

Les grandes lignes de la politique éducative du quinquennat sont toutefois déjà tracées. Et celle qui a été porte-parole des candidats présidentiels Ségolène Royal puis François Hollande maîtrise les ficelles de la communication.

Langue de bois ou « maîtrise » de la parole

De violentes attaques sur ses origines lui attirent d’abord la sympathie de la communauté éducative. Elle a déjà subi ce type d’invectives lors du lancement avec Vincent Peillon des ABCD de l’égalité et était une cible des opposants au mariage pour tous et de mouvements d’extrême droite.

En sept mois rue de Grenelle, Najat Vallaud-Belkacem a dû gérer plusieurs dossiers délicats dans un portefeuille où les polémiques enflent vite et les ministres restent rarement plus de deux ans: généralisation de la réforme des rythmes scolaires avec quelques maires récalcitrants, contestations locales de la réforme de l’éducation prioritaire, scandale de pédophilie dans une école à Villefontaine.

Celle qui « n’avait pas le profil habituel du poste », « apporte plus d’écoute, de compréhension, d’imagination, d’invention que bien d’autres avant elle », salue en mars François Hollande.

Avec les réformes concomittantes du collège et des programmes scolaires, elle se retrouve depuis deux mois sous le feu croisé des critiques de plusieurs syndicats, dont le plus puissant, le Snes-FSU, d’associations de profs de langues anciennes et d’allemand, d’intellectuels et de candidats pressentis à la primaire de l’UMP. « La vie politique n’est pas un chemin de roses lorsqu’on est ministre de l’Education », rappelle un de ses proches, le député PS Guillaume Garot. « Elle a montré qu’elle avait des convictions lorsqu’elle était ministre des Droits des femmes ».

Pour le député UMP Philippe Gosselin, il est « normal que le débat s’organise autour d’elle » car « François Hollande a fait d’elle un emblème de son quinquennat. Elle a une force symbolique, c’est un espoir de la gauche ». Ses détracteurs évoquent sa « langue de bois ». La ministre répond qu’elle « maîtrise » sa parole. Mais dans le feu de la crise, elle a commis quelques maladresses de langage, évoquant « l’ennui » des collégiens ce qui a heurté les enseignants (elle utilise désormais le terme « passivité » des élèves) et qualifiant des personnalités opposées à la réforme de « pseudo-intellectuels ».

Malgré cette crise, la ministre reste populaire, avec 49% de bonnes opinions dans le dernier baromètre de Paris-Match (en perte de seulement trois points en deux mois). Lors de ses déplacements dans les établissements scolaires, les élèves jouent des coudes pour un « selfie » avec la ministre. Elle est mariée avec Boris Vallaud, secrétaire général adjoint de l’Elysée, et a des jumeaux de six ans.

AFP