Avec les beaux jours reviennent aussi certains démarcheurs qui échangent leurs (mauvais) services contre des sommes délirantes. Un expert tire la sonnette d’alarme.
Ces «professionnels» sont catégoriques : votre toit a besoin d’un traitement antimousse. Ou bien il s’agit de votre façade, qui mériterait un coup d’enduit. Ah, mais tiens, votre cheminée doit impérativement être ramonée… Le prix? On verra ça après.
Avec le retour des beaux jours débute la saison des travaux de réparation et de nettoyage de votre domicile. Des petits travaux qui peuvent vite faire grimper la facture si on ouvre la porte à certaines entreprises, avertit Jean-Loup Stradella : «Pour un nettoyage de toit, c’est-à-dire une prestation qui dure souvent moins de deux heures, on a déjà vu des factures qui dépassent les 30 000 euros!»
Et gare aux clients récalcitrants : «Certains se voient menacés ou manipulés. Si le client ne peut pas s’acquitter directement de la somme, le prestataire va l’accompagner jusqu’à la banque pour qu’il retire le maximum d’argent.»
Jean-Loup Stradella est juriste au Centre européen des consommateurs (CEC) Luxembourg. Il reçoit parfois plusieurs coups de téléphone par semaine de consommateurs dépités – ou de leurs proches –, bernés par des démarcheurs réalisant des services à des coûts exorbitants. Souvent sans les compétences requises, avec des malfaçons à la clé.
Des voyous souvent impunis
Des méthodes de voyous, hélas, rarement condamnés : «À partir du moment où il y a un contrat qui est signé au domicile du consommateur, il y a un délai de rétractation de 14 jours. Mais s’il s’agit d’une prestation de service déjà réalisée, comme le nettoyage du toit par exemple, le droit de rétractation ne s’applique plus.» Une faille dans laquelle s’engouffrent ces prestataires, profitant souvent de l’ignorance ou de la faiblesse de leurs clients.
On pense évidemment aux personnes âgées ou vulnérables, mais monsieur Tout-le-monde n’est pas à l’abri : «Cela n’arrive pas qu’au voisin. Ils utilisent des méthodes de déstabilisation et de manipulation qui peuvent vraiment faire beaucoup de victimes…»
S’ils ne sont évidemment pas toujours malhonnêtes, les artisans ambulants sont «souvent sources de problèmes», prévient le CEC. Ils sillonnent le pays en camionnette (souvent sans indication du nom de l’entreprise), sonnent spontanément aux portes ou vous abordent directement dans la rue. Et ils ont rarement pignon sur rue : «Ce sont des prestataires qui peuvent venir du Luxembourg mais aussi de la Grande Région, et qui ont rarement une existence légale. Ils peuvent opérer pendant quelques semaines puis disparaître dans la nature, donc c’est très compliqué de se retourner contre eux.»
Car si la loi prévoit de lourdes peines en cas d’escroquerie ou d’abus de faiblesse, reste à le prouver : «À part avec un flagrant délit, il y a peu d’espoir.» Attention, donc, à ce que vous signez : «Certains vont vous faire un devis sur un bout de papier qui n’a aucune valeur, qu’ils vous pressent de signer sur-le-champ. C’est pour cela que derrière il y a très peu de recours.»
Sans compter les démarchages qui servent de repérage pour de futurs cambriolages! Attention, donc, à ces démarcheurs qui riment avec arnaqueurs.
Romain Van Dyck.
Demandez la facture en bonne et due forme
Depuis sa conversation téléphonique avec le responsable d’une société de nettoyage, cette résidente luxembourgeoise est inquiète : «Je ne me sens plus en sécurité. Je viens de recevoir trois appels étranges, sûrement passés via un opérateur par internet», écrivait-elle en septembre dernier. Si cette personne a des raisons de penser qu’il s’agit de la société de nettoyage, c’est parce que celle-ci a tenté de l’arnaquer, apprend-on auprès du CEC Luxembourg. Alors qu’elle nettoyait sa terrasse avec un karcher, un professionnel l’a abordé en proposant de nettoyer sa façade avec un traitement antimousse, contre 600 euros. Un tarif correct. Mais le professionnel a commencé les travaux immédiatement, et des traces sont apparues sur la façade. De plus, une odeur très forte et très désagréable a été ressentie. Le consommateur a immédiatement demandé qu’il cesse les travaux.
Le ton est monté, le consommateur a reçu plusieurs appels menaçants les jours suivants, mais il est resté ferme en demandant une facture en bonne et due forme avec la TVA. Le professionnel ne l’a jamais fournie et le consommateur n’a jamais payé.
Que faire?
D’abord, prévenir plutôt que guérir : vous pouvez vous protéger contre ces «visites» en apposant l’ autocollant «Colportage Nee Non Nein Merci! » (disponible auprès du CEC et de l’Union luxembourgeoise des consommateurs) sur votre boîte aux lettres, votre porte ou autres.
Ensuite : prendre le temps de réfléchir , ne rien signer ou accepter sur un coup de tête! Et faire plusieurs devis chez plusieurs prestataires pour comparer. Il faut aussi s’assurer que l’entreprise a une adresse et les mentions légales .
En cas de problème, contacter le CEC (www.cecluxembourg.lu), l’ ULC (www.ulc.lu) ou la police (113 ou www.police.lu). Plus il y a de plaintes, plus il y a de chances d’enquête!