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Mort d’un SDF au Findel : le prévenu dit l’avoir « enlacé »


«C'est possible qu'on se soit retrouvé assis à côté l'un de l'autre lors d'un repas, que j'aie dormi dans un lit superposé au-dessus de lui au foyer et qu'on se soit enlacés place de l'Église à Bonnevoie…», s'est défendu le prévenu. (illustration Hervé Montaigu)

Le prévenu dont l’ADN a été décelé sur les vêtements du sans-abri blessé près du foyer au Findel conteste l’avoir frappé. Il dit l’avoir enlacé à Bonnevoie.

« Au loin, j’ai aperçu quelque chose au sol. J’ai d’abord pensé à un sac-poubelle noir. Deux silhouettes se trouvaient à côté. Au moins une d’entre elles donnait des coups de pied. » En cette soirée du 28 mars 2014, il est un peu plus de 20h30 quand cette femme s’apprêtant à récupérer sa voiture sur un parking route de Trèves aperçoit cette scène obscure à une centaine de mètres. «C’était comme si on donnait un coup de pied dans un ballon de foot», poursuit le témoin.

Les deux silhouettes finissent par poursuivre leur chemin. «Quand on est arrivé sur les lieux, on a vu qu’un homme gisait au sol. Il était dans un très mauvais état», confirment les deux personnes qui étaient avec le témoin ce soir-là. La suite du drame est connue. Malgré les premiers secours, la victime de 41 ans, qui souffre d’un hématome sous-dural, décède quelques jours plus tard à l’hôpital.

La 13e chambre criminelle a également entendu un homme qui logeait le soir du drame au foyer de nuit de la Wanteraktioun au Findel. Le témoin raconte être sorti du bus au même arrêt que la victime et les deux prévenus, un Polonais et un Lituanien.

«Les trois sont restés derrière moi. Je n’ai rien entendu», raconte-t-il. C’est seulement un peu plus tard dans la soirée qu’il aurait revu les hommes de l’Est au foyer. «Le plus grand d’entre eux m’a fait le signe ‘chut’», précise-t-il.

Mais le prévenu Andrzej R. (39 ans), d’origine polonaise, conteste avoir traîné à l’arrêt de bus : «J’ai couru au foyer pour m’assurer d’avoir une place pour la nuit.» Ce n’est que le lendemain qu’il aurait appris en même temps que le Lituanien, via la police, ce qui s’était passé.

« Ce soir-là, j’étais saoul »

Quand la présidente l’a rendu attentif au fait qu’à la police il avait déclaré qu’en sortant du bus il avait vu une personne au sol, il a répondu : «Je ne me rappelle pas avoir vu quelque chose. Ce soir-là, j’étais saoul.»

Le trentenaire n’est pas non plus d’accord avec les déclarations du prévenu Baltaduonis E. (36 ans). Le Lituanien, absent au procès après avoir bénéficié d’une mise en liberté provisoire en novembre 2017, a affirmé au juge d’instruction que, après une dispute verbale, le Polonais aurait poussé la victime. Elle serait tombée au sol et puis aurait encaissé des coups de pied.

Andrzej R. conteste les faits sur toute la ligne : «Pourquoi devrais-je me disputer avec elle ? Je ne sais pas pourquoi il m’accuse de la sorte.» La présidente ne désarme pas : «Plusieurs fois, vous avez dit que vous ne connaissiez pas la victime. Comment expliquez-vous donc que votre ADN a été trouvé sur les vêtements de la victime à deux points isolés sur le t-shirt et la manche gauche de sa veste?»

«C’est possible qu’on se soit retrouvé assis à côté l’un de l’autre lors d’un repas, que j’aie dormi dans un lit superposé au-dessus de lui au foyer et qu’on se soit enlacés place de l’Église à Bonnevoie…», se défend le prévenu. Mais pour l’experte en génétique, ces contacts sociaux ne peuvent pas justifier ce dépôt d’ADN. Car l’expertise n’aurait mis en évidence aucune trace sur le dos.

«Que dites-vous de l’hypothèse que pour une raison quelconque vous avez donné un coup à la victime à la sortie du bus pour qu’elle tombe ? On a trois témoins qui disent avoir aperçu deux silhouettes près de la victime, dont une au moins aurait donné des coups de pied», insiste enfin la présidente. Le prévenu ne bougera pas d’un iota : «Je n’ai jamais fait quelque chose de pareil !»

Les plaidoiries de la défense et le réquisitoire du parquet étaient prévues mercredi après-midi.

Fabienne Armborst