C’est une anecdote assez incroyable que nous relatons, à l’occasion du décès du chanteur Jacques Higelin ce vendredi. C’est Jean-Louis Mille, actuel violoniste du Groupe Sans Gain (Lorraine) qui nous la raconte…
«On est en 1986 ou 87, en Meuse, aux confins de l’Argonne. Nous étions jeunes instituteurs dans un village qui s’appelle Villotte-devant-Louppy. En pleine semaine, une rumeur se met à tourner : Jacques Higelin va venir jouer demain soir, au gymnase d’un village à côté, alors nommé Triaucourt. On est loin des Zéniths des grandes villes, vous voyez! Au début, personne n’y croit. Mais la rumeur ne cesse d’enfler. Jacques Higelin avait déjà sorti l’album «Champagne», c’était une pointure du rock français… pourquoi viendrait-il jouer ici, un soir en pleine semaine? Finalement, tout le monde se met à y croire. Niveau communication, c’était une autre époque : pas de portable, pas internet. Et dans la rue, pas une affiche qui aurait confirmé l’événement! Tout a fonctionné au bouche-à-oreille dans l’histoire…
Le soir, tout le monde y croit!
Le soir en question, le gymnase de Triaucourt (NDLR : devenu Seuil d’Argonne entre temps) se retrouve pris d’assaut : 200 ou 300 personnes, je ne sais plus. Et Jacques Higelin est bien là. Avec une dégaine pas possible, les cheveux ébouriffés et en treillis militaire. Il est seul au milieu du gymnase, avec un piano à queue, et un type qui joue superbement bien de l’harmonica. C’est un souvenir exceptionnel : Jacques Higelin avait joué trois heures, en déclamant des textes et en reprenant des chansons soufflées par le public.
Pourquoi était-il venu ici? Nous avons appris ensuite qu’un adolescent du village lui avait écrit une lettre : il lui avait expliqué que c’était son rêve de voir Jacques Higelin jouer près de chez lui. Visiblement, cet adolescent était handicapé. C’est ce qu’on nous a dit. Mais évidemment, Jacques Higelin n’a pas glissé un mot de tout ça, il avait sa pudeur et sa générosité d’artiste pour lui.»
Hubert Gamelon.