Depuis vendredi dernier, une femme de 38 ans comparaît devant la 13e chambre correctionnelle pour avoir profité de l’état de faiblesse d’un veuf, âgé aujourd’hui de 87 ans. Au deuxième jour du procès mardi matin, le compagnon de la prévenue a été entendu comme témoin.
L’octogénaire n’aurait pas arrêté de se plaindre. Il lui aurait régulièrement lancé des insultes. Et il aurait jeté autour de lui les plats préparés qui ne lui plaisaient pas… Le tableau dressé par le compagnon de la prévenue poursuivie pour abus de faiblesse n’est pas flatteur. Toujours est-il que cette dernière est restée habiter dans la maison du veuf jusqu’à l’intervention de la police en septembre 2015. On en arrive à treize années au total.
Si la relation a dans un premier été agrémentée d’amour, elle a fini par se dégrader. Dès 2009, madame avait un nouvel homme dans sa vie. Ce n’est pas pour autant qu’elle a déménagé. Elle devait s’occuper de l’octogénaire, lui indiquait-elle.
«Comment avez-vous pu tolérer que votre compagne reste vivre avec le veuf ?» «Pourquoi n’est-elle pas tout simplement partie ?» «Vous ne vous êtes pas senti comme la cinquième roue du carrosse ?» La présidente a beau répéter et reformuler ses questions, la réponse du témoin est quasiment toujours la même : «Je ne peux pas vous donner d’explication.»
«Il dansait encore début 2015 à Wasserbillig»
La représentante du parquet est également intervenue rappelant qu’ils avaient bien fini tous les trois en voyage à Palma de Majorque. «Il m’est apparu si pitoyable que j’ai toléré cela.» Voilà sa réponse. «Et tout cela pendant six ans ?!», insiste la présidente. – «Oui !»
N’empêche que la présidente a trouvé que le témoin était drôlement bien informé sur les cartes bancaires de l’octogénaire. «Il avait une carte VPay et une carte VISA», a-t-il glissé au détour d’une phrase. Un élément qui n’a toutefois pas échappé au tribunal. La précision qu’«à chaque fois sa carte lui avait été rendue» n’a pas interrompu le feu des questions.
Quand la présidente a relevé qu’ «avec les cartes bancaires [de l’octogénaire] des retraits d’argent avaient été effectués dans l’ensemble du pays», le témoin a répliqué : «Mais il était aussi en vadrouille à travers tout le pays.» Peut-être à la fin ne les aurait-il plus accompagnés partout, mais il les aurait tout de même accompagnés encore un peu.
Au cours de son audition qui s’est étirée sur plus de deux heures, le témoin a eu du mal à confirmer l’état de santé fragile de l’octogénaire. «Il dansait encore début 2015 dans un restaurant à Wasserbillig.»
Le fils dit tout le contraire
C’est tout le contraire de ce que le fils de l’octogénaire avait affirmé en début d’audience. «Quand j’ai revu mon père lors d’un enterrement fin août 2015, il avait le visage jaune. Il ne pouvait presque plus marcher. Il s’est traîné jusque dans l’église.» En l’accompagnant aux toilettes, il avait découvert qu’il portait une couche pleine. Il lui avait donné des sous-vêtements propres. L’état désolant de sa maison n’avait pas non plus laissé le fils indifférent : «C’était un choc. La situation n’était pas supportable : tant au niveau des saletés que de l’odeur.»
En fin d’audience, la 13e chambre correctionnelle a entendu une amie de la prévenue. Elle l’avait accompagnée à Londres. Avant leur départ, elle avait été témoin d’un retrait d’argent au distributeur. L’octogénaire leur aurait suggéré d’emporter un peu d’argent de poche. Mardi, elle a confirmé que la trentenaire était allée retirer cet argent. Autour de 150 euros, a-t-elle précisé sur demande du tribunal. Après cette opération, la carte aurait bien été remise à l’octogénaire.
Mais quand le ministère public lui a fait remarquer que ce jour-là 1 000 euros avaient été retirés, elle a subitement changé de version et ajouté qu’elle lui avait aussi remis le reste de l’argent. La réplique du parquet ne s’est pas longtemps fait attendre : «Cela remet toute votre déclaration en question. C’était le seul retrait qui est bien documenté dans le dossier.»
Le procès se poursuit vendredi matin. C’est un dossier où on avance à petits pas. Quatre autres témoins doivent en effet encore être entendus avant la prévenue.
Fabienne Armborst