Logement, mobilité, sécurité, politique sociale… Lydie Polfer détaille la feuille de route de la coalition DP-CSV pour les six prochaines années à Luxembourg.
Vous entamez votre cinquième mandat en tant que bourgmestre de la capitale. Comment expliquez-vous votre longévité ?
Je ne sais pas. Peut-être pour une raison toute simple, c’est que j’ai commencé tôt (elle sourit). Sincèrement, cela me touche vraiment de voir que je bénéficie encore de la confiance et de l’appui des citoyens de notre Ville et de notre pays. C’est ça qui me donne le courage et l’énergie nécessaires pour aborder les défis qui se présentent pour notre ville.
Pour aborder les nouveaux défis de la Ville, vous avez changé de partenaire de coalition…
Ce n’est pas moi qui ai changé de partenaire, ce sont les électeurs qui ont donné des signaux clairs. Ils nous ont placés largement en tête et ont donné deux sièges de plus au CSV. Ce n’est pas un choix contre quelqu’un. Nous avons eu une bonne collaboration avec notre partenaire de ces douze dernières années (déi gréng). Il y a des élections pour que l’électeur puisse se prononcer et mettre des nuances. Si on veut rester démocratique, il faut rester attentif à ces signaux. C’est ce que nous avons fait.
Comment se passe votre collaboration avec le CSV ?
Dès le début, il n’y a eu aucun problème. Avec monsieur Wilmes, une relation de confiance s’est installée dès que nous avons pris contact. Je ne révèle pas un secret puisque lui-même s’en est expliqué. On lui a proposé, le lendemain des élections, une coalition contre le DP, c’est-à-dire avec déi gréng et le LSAP. Lui m’avait assuré ne pas vouloir le faire. C’est une bonne base pour une relation de confiance.
Quelle est la philosophie de la déclaration échevinale DP-CSV, présentée lundi dernier et adoptée lundi ?
Notre objectif est que la Ville aille de l’avant en évoluant positivement sans avoir besoin de faire une révolution. Pour ce faire, il faut être à l’écoute de la Ville et de ses citoyens. Il faut rester attentif et ouvert sur la manière dont une société évolue. Notre Ville est très cosmopolite et il y a de la cohésion dans la diversité. Notre volonté est de conserver une société unie.
Cette déclaration échevinale a entraîné certaines critiques…
Je n’ai pas vraiment trouvé. Mais aucune déclaration n’est parfaite et il faut rester ouvert. Par exemple, l’opposition dit que sur la transparence, on n’a rien écrit, mais c’est tellement évident.
L’opposition, votre ancien partenaire de coalition déi gréng notamment, parle d’un manque de vision sur le logement. Par exemple sur l’avenir du terrain d’Arlon où se trouvent actuellement le stade Josy-Barthel, la caserne des pompiers et le centre de recyclage.
Le logement est notre priorité et nous voulons rapprocher le lieu d’habitation du lieu de travail. Pour revenir sur le site de la route d’Arlon, c’est un terrain de 7 hectares, qui sera disponible par étapes. Le nouveau stade sera prêt fin 2019, la nouvelle caserne des pompiers en 2020, et en ce qui concerne le centre de recyclage, on sait où il sera situé et on a des avant-projets. Sur ces 7 hectares, on va faire un concours pour le tout, mais ce critère de mise à disposition des terrains par étapes sera une demande dans le cahier des charges pour le concours d’architectes. Et je le dis très clairement, ce site de la route d’Arlon sera destiné au logement. Ce sera un quartier résidentiel équilibré avec des commerces de proximité et les infrastructures nécessaires.
Dans le chapitre mobilité, la voiture tient une place importante. Allez-vous la privilégier par rapport aux autres modes de transport ?
La voiture n’est pas de retour, elle est là. François Bausch (ministre du Développement durable et des Infrastructures) l’a dit récemment : actuellement, 69% des mouvements se font en voiture privée et 17% seulement en transports publics. La voiture ne doit pas être un mot tabou et si, à certains endroits, on peut alléger les bouchons soit par des infrastructures soit par les feux, on va le faire et c’est bien pour l’environnement. Il faut pouvoir en parler. On parle beaucoup de mobilité douce et c’est très bien. On a fait beaucoup et on va continuer de faire beaucoup. On va continuer d’encourager les gens à prendre des transports publics plus attractifs comme le tram. Mais il faut rester réaliste, on ne peut pas considérer la mobilité en Ville seulement sous l’œil de la mobilité douce. Tous les modes de transport doivent être pris en compte.
Le thème de la sécurité fait également partie de vos six priorités. Trouvez-vous que l’insécurité a augmenté en Ville ?
Non, notre Ville est l’une des plus sûres du monde. Ce qui est dangereux est qu’un sujet devienne tabou. Si une situation existe, il faut pouvoir en parler. Donc parler des incivilités que nous voyons à certains endroits de la Ville doit être quelque chose de normal et, surtout, il faut trouver des réponses adéquates. Bien évidemment, la première réponse est la prévention, et la deuxième est l’encadrement social. Mais il y a des situations où ni l’un ni l’autre n’ont eu de prise sur la situation et là, il faut évidemment pouvoir employer des mesures de répression. À ce moment-là, ce n’est plus entre nos mains et ce n’est plus de la compétence des bourgmestres, mais il faut pouvoir le dire.
Vous voulez augmenter la présence policière en Ville. Comment ?
La présence policière n’a pas suivi la croissance de la population. Nous allons continuer à travailler avec Étienne Schneider (ministre de la Sécurité intérieure). La police est prête à engager plus de personnes, mais a du mal à les trouver. C’est une question d’organisation. Pour que la Ville reste sûre, on ne peut pas faire abstraction de situations qui demandent des remèdes.
L’opposition a aussi pointé un manque d’envie de la coalition DP-CSV…
C’est juste le contraire. Là aussi, nous avons fait beaucoup et nous allons continuer. Mais… Par exemple, l’Abrigado est victime de son succès. D’ici à Paris, il n’y a pas d’institution semblable, cela concentre un tourisme social. Mais il faut penser aux deux côtés. Il faut trouver les réponses adéquates à des cas de détresse, mais pas au détriment de la population résidente. Ce n’est pas pour ne plus s’occuper des cas de détresse humaine et là, il faut trouver des réponses adéquates. La Ville est certes la capitale, mais elle ne peut pas toujours tout faire toute seule. Il faut pouvoir en parler.
Comment voyez-vous la Ville dans six ans ?
Elle sera vraiment, vraiment encore plus belle. Cela me donne l’énergie de chaque jour et d’aborder tous les projets. Dans six ans, le tram ira de la Cloche d’or au Findel, le Royal-Hamilius sera terminé, la place Guillaume-II réaménagée, le Ban de Gasperich construit avec son parc de 16 hectares… Je me réjouis de voir cela. Et à ce moment-là, on pourra se dire que tous ces chantiers, ce vacarme, ces embouteillages n’auront pas été inutiles.
Entretien avec Guillaume Chassaing