La forêt, tout le monde peut se l’approprier, ou presque. Mais aucune loi ne la protège vraiment. Le ministère de l’Environnement travaille sur un texte qu’il espère livrer l’année prochaine.
La forêt, au Luxembourg, c’est sacré. Les 92 000 hectares boisés, soit 35 % du territoire, sont à la disposition du public pour ses loisirs. La nouvelle loi devra faire cohabiter toutes les fonctions de la forêt.
Il reste dans les tuyaux du ministère de l’Environnement un grand dossier que la ministre Carole Dieschbourg et le secrétaire d’État Camille Gira souhaitent faire aboutir avant les prochaines élections, c’est celui des forêts. «Nous n’avons pas une seule loi qui protège nos forêts», regrette la ministre Carole Dieschbourg (déi gréng). Elle tirait déjà la sonnette d’alarme en février 2016 et elle espère bien pouvoir déposer un texte de loi deux ans plus tard. Si tout va bien.
«C’est un domaine intéressant, un dossier très discuté, car très émotionnel aussi», témoigne Carole Dieschbourg, que nous avions interrogée sur le sujet. «Nous sommes en train de regarder toutes les législations existantes qui touchent à la forêt, afin de faire une refonte des textes pour aboutir à une loi moderne, transparente et cohérente», déclare-t-elle.
Certains textes toujours en vigueur ont plus de 200 ans… et sont parfois contraires aux résolutions internationales signées par le Luxembourg, en raison des nouveaux défis liés aux changements climatiques et d’une pression croissante sur la forêt, ses biens et ses services, selon le ministère.
L’année dernière, un débat de consultation à la Chambre des députés avec les propriétaires et les ONG a permis de réunir tous les acteurs. «Cela a pris du temps pour rassembler tout le monde à bord», explique la ministre de l’Environnement. Et il reste à rédiger un projet de loi qui mette tout le monde d’accord.
Le texte devra veiller à la multifonctionnalité des forêts : «Elle représente un habitat pour la faune. Elle est aussi un vecteur économique et nous avons au Luxembourg un cluster dédié à l’industrie du bois. Et elle est un espace de repos pour tous les citoyens, un espace de loisir et touristique, résume la ministre. Si un peu plus de la moitié des forêts appartient à des propriétaires privés, 99 % des zones forestières sont accessibles au public qui y pratique des tas de loisirs.»
Il faut dès lors faire cohabiter toutes ces activités avec celle de la chasse, bien entendu, tout en veillant à sauvegarder les forêts. Sont-elles en péril? Disons qu’elles ne sont pas au top de leur forme et restent encore sous-exploitées. «Il faut surtout améliorer le rendement de la forêt privée, qui représente plus de la moitié de la superficie boisée du pays et cela dépend largement des aides publiques pour la création et la gestion de forêts saines et productives», lit-on dans le plan général du code de l’environnement.
Aider les propriétaires
Les forêts du pays, en plus d’être vieillissantes, souffrent aussi des impacts liés aux activités humaines (pollution de l’air, changement climatique…). «Leur état de santé s’est constamment détérioré ces trente dernières années, touchant toutes les essences forestières», avertissait la ministre il y a 18 mois.
Depuis, elle a multiplié les rencontres avec tous les acteurs concernés par la forêt. Surtout les propriétaires, qui pour la plupart sont réunis au sein de l’ASBL Groupement des sylviculteurs (le Lëtzebuerger Privatbësch). «Selon la superficie qu’il possède, le propriétaire d’une forêt doit établir des plans de gestion durable, comme le font les communes», explique la ministre Carole Dieschbourg.
Beaucoup sont des petits propriétaires et ceux-là ne font presque rien. Mais le texte en préparation devrait permettre au propriétaire forestier de bénéficier d’un soutien de l’État «pour la fourniture de services écosystémiques, y compris l’accomplissement de fonctions spéciales de protection dans l’intérêt général», a indiqué le ministère l’année dernière.
Le but de cette réforme est de créer un vrai «code forestier» qui fasse consensus.
Geneviève Montaigu