Selon le dernier rapport du Statec sur la cohésion sociale, près de trois personnes sur dix ont connu un épisode de pauvreté entre 2013 et 2016.
À l’occasion de la journée internationale pour l’Élimination de la pauvreté, qui a lieu aujourd’hui, le Statec a publié hier un rapport d’une centaine de pages sur la cohésion sociale au Luxembourg. Un rapport qui met à mal certains clichés voulant qu’au Grand-Duché la pauvreté est inexistante.
Hier, le Statec a présenté des chiffres sur la pauvreté au Luxembourg, dans un rapport analysant la cohésion sociale du Grand-Duché à travers quatre dimensions que sont les revenus, le travail, les langues et la santé.
Il est assez facile de sortir quelques chiffres pêle-mêle sur le sujet de la pauvreté au Luxembourg tant ce rapport regorge de données. Par exemple, en 2016, les personnes résidant au Luxembourg vivaient avec un niveau de vie médian de 2 817 euros par mois ou encore 10 % des individus ayant les niveaux de vie les plus bas ne possèdent que 3 % de la masse totale des revenus des ménages, alors qu’à l’extrémité, les 10 % des individus les plus aisés possèdent 24 % de cette masse totale. On peut y lire aussi que 20 % des personnes les plus aisées ont un revenu moyen qui est 4,9 fois supérieur à celui des 20 % les moins aisées.
Des chiffres démontrant une certaine inégalité, mais qui ne renseignent pas vraiment sur la pauvreté en elle-même, d’où l’importance de comprendre la notion de «risque de pauvreté».
Selon la définition de l’OCDE, le taux de pauvreté correspond à la proportion de personnes dont le revenu est inférieur au seuil de pauvreté, c’est-à-dire à la moitié du revenu médian de la population totale. Au Luxembourg, le seuil de risque de pauvreté est obtenu en prenant 60 % du revenu médian calculé au niveau national.
Ainsi, pour l’année 2016, la valeur de ce seuil est de 1 689 euros par mois alors qu’en 2015, il était de 1 716 euros. Le Statec estime que 16,5 % de la population était en situation de risque de pauvreté en 2016 (c’est-à-dire que ces personnes avaient un niveau de vie mensuel inférieur au seuil de 1 689 euros), un chiffre en augmentation par rapport à l’année 2015, où le risque de pauvreté concernait 15,3 % de la population. En remontant dix ans en arrière, en 1996, 11 % de la population résidant au Luxembourg était en situation de risque de pauvreté.
L’emploi et la santé pour y échapper
Le Statec va plus loin, en constatant qu’en 2016 le niveau de vie moyen des individus varie de 984 euros par mois pour les 10 % des individus les moins aisés à 7 891 euros pour les 10 % les plus aisés. L’institut statistique estime que, en 2016, 6 % des personnes qui n’étaient pas en risque de pauvreté en 2013 ont chuté dans la pauvreté en 2016, mais qu’à l’inverse 28 % des personnes en risque de pauvreté en 2013 en sont sorties l’année dernière. Enfin, entre 2013 et 2016, 30 % des personnes ont connu au moins un épisode de pauvreté.
Pour le Statec, l’emploi est un atout pour échapper à l’exclusion sociale. Mais là encore, il faut s’interroger sur la qualité de l’emploi au Luxembourg. Ainsi, depuis 2000, l’emploi intérieur a augmenté de 60 % au Grand-Duché, une situation exceptionnelle au sein de l’Union européenne, sans compter que l’année dernière le nombre d’emplois était également en hausse de 3,1 %, soit 13 000 postes. Le Statec note que les formes de travail atypique progressent, comme par exemple les contrats à durée déterminée, le travail les samedis et dimanches, le soir et la nuit. D’un autre côté, le travail à temps partiel augmente aussi, mais au Luxembourg il est le plus souvent le résultat d’un choix.
Un autre facteur d’inégalité qui semble inquiéter, c’est la santé. Toujours selon le Statec, les hommes peuvent s’attendre à vivre 80 % de leur vie en bonne santé, alors que pour les femmes ce taux s’élève à 72 %. Le rapport insiste sur le lien de cause à effet entre la pauvreté et la santé, puisqu’il est constaté que la part des personnes en bonne santé augmente avec le revenu et le niveau d’éducation, alors que la pauvreté engendre une mauvaise santé, et une mauvaise santé, la pauvreté.
Jérémy Zabatta
Il y a 25 ans, l’ONU a fait du 17 octobre la journée internationale pour l’Élimination de la pauvreté. Dans le cadre de cette journée internationale, le ministre de la Coopération et de l’Action humanitaire, Romain Schneider a souhaité, par un communiqué de presse, «mettre l’accent sur les efforts concrets entrepris par le gouvernement luxembourgeois en vue d’éliminer la pauvreté.
Grâce au large soutien de la part de la population luxembourgeoise, le Luxembourg a très tôt atteint et même dépassé la cible des 0,7 % du revenu national brut que se sont fixée les pays développés, et aujourd’hui le Luxembourg consacre 1 % de son revenu national brut à l’aide publique au développement».