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Serge Atlaoui : mise en garde de Paris à Jakarta


L’ambassadeur de France à Jakarta a averti vendredi l’Indonésie que la possible exécution d’un Français condamné à mort pour trafic de drogue aurait des «conséquences» sur les relations bilatérales.

«En cas d’exécution, cela ne sera pas sans conséquences sur notre relation bilatérale», a déclaré l’ambassadeur, Mme Corinne Breuzé, lors d’une conférence de presse, réaffirmant que la France, qui a aboli la peine de mort en 1981, y était «opposée en tous lieux et en toutes circonstances». Serge Atlaoui, 51 ans, avait été arrêté en 2005 dans un laboratoire clandestin de production d’ecstasy dans la banlieue de Jakarta, et condamné en 2007 à la peine capitale pour trafic de drogue. Cet artisan soudeur a toujours clamé son innocence, affirmant n’avoir fait qu’installer des machines dans ce qu’il croyait être une usine d’acrylique.

Le Français a déposé un ultime recours en révision devant la Cour suprême, dont la décision est imminente. En cas de rejet, son exécution en même temps que celle d’autres étrangers pourrait être rapide. Les autorités indonésiennes ont déjà préparé une deuxième liste de condamnés à fusiller, après les exécutions de janvier, les premières depuis 2013. Dans l’affaire Atlaoui, huit autres individus arrêtés en même temps que le Français ont également été condamnés à mort. Mais «ce qui nous apparaît choquant, c’est que notre compatriote soit aujourd’hui le seul figurant dans la liste des exécutables», a dit l’ambassadeur.

Une législation antidrogue extrêmement sévère dans le pays

«Je rappelle que Serge Atlaoui a été reconnu coupable comme chimiste alors qu’il n’est qu’un technicien soudeur au rôle mineur dans cette affaire», a-t-elle encore dit, ajoutant que le gouvernement français était par ailleurs «disposé à aider l’Indonésie dans sa lutte contre le trafic de drogue». La législation antidrogue de ce pays d’Asie du Sud-Est est l’une des plus sévère au monde. Le président Joko Widodo, qui a pris ses fonctions en octobre dernier, a rejeté toutes les demandes de grâce de condamnés à mort pour trafic de drogue, estimant que son pays était dans une situation d’urgence face aux produits stupéfiants qui font des dizaines de morts chaque jour.

En revanche, l’Indonésie fait tout son possible pour tenter de sauver la vie de ses ressortissants condamnés à mort à l’étranger. Jakarta a ainsi protesté auprès de l’Arabie Saoudite après l’exécution cette semaine de deux Indonésiennes dans le royaume. Présente à la conférence de presse, l’épouse du Français, Sabine Atlaoui, a lancé avec émotion un appel au président indonésien: «Mon mari n’est pas un baron de la drogue. Il ne mérite pas la peine de mort. En votre âme et conscience, n’exécutez pas mon mari».

Elle a ajouté que sa famille et ses enfants vivaient une «torture psychologique», en évoquant une demande du Parquet général au début du mois, alors qu’un tribunal venait de transmettre le dossier du Français à la Cour suprême. «Un membre du bureau du procureur nous a demandé d’ores et déjà les mensurations de mon mari pour son futur cercueil, ce qui est inimaginable et inconcevable dans le contexte dans lequel nous sommes», a-t-elle dit.

AFP