Accueil | Monde | États-Unis : le procureur spécial sur l’affaire russe enquête désormais sur Trump

États-Unis : le procureur spécial sur l’affaire russe enquête désormais sur Trump


Donald Trump a-t-il fait obstruction à la justice dans l'affaire russe? (photo AFP)

Donald Trump a-t-il fait obstruction à la justice dans l’affaire russe? Cette question fait désormais partie de l’enquête du procureur spécial qui chapeaute l’investigation sur l’ingérence présumée de Moscou dans la présidentielle américaine.

Le procureur indépendant Robert Mueller, ancien chef du FBI, interroge actuellement de hauts responsables du renseignement pour déterminer si le président américain a tenté de freiner ou bloquer l’enquête qui s’intéressait jusqu’ici à cette ingérence, ainsi qu’à une possible collusion entre les proches de Donald Trump et la Russie, selon le quotidien Washington Post qui cite des sources anonymes.

Le fait d’élargir ainsi le champ de l’enquête représente « un tournant majeur », souligne le Washington Post, qui affirme par ailleurs que les enquêteurs sont à la recherche de potentiels délits financiers chez les collaborateurs du milliardaire républicain.

Le quotidien New York Times a publié les mêmes informations, en citant des sources proches de l’enquête.

Le procureur Mueller aurait sollicité des entretiens avec cinq pontes du renseignement, dont trois ont accepté d’être entendus. Il s’agit de Daniel Coats, directeur du Renseignement, Mike Rogers, directeur de l’agence d’espionnage NSA, ainsi que de son ancien adjoint, Richard Ledgett. Ces entretiens pourraient se tenir dès cette semaine, selon le Post.

Toujours d’après le Washington Post, M. Mueller s’intéresse particulièrement à un échange entre Daniel Coats et ses collaborateurs le 22 mars.

Le directeur du Renseignement aurait alors dit que M. Trump lui avait demandé d’intervenir auprès de James Comey, alors chef du FBI, pour qu’il abandonne l’enquête sur l’ex-conseiller à la sécurité nationale de la Maison blanche Michael Flynn, au coeur de l’affaire de la collusion supposée entre Moscou et l’entourage du président des Etats-Unis.

Quelques jours plus tard, M. Trump avait demandé à MM. Coats et Rogers de déclarer publiquement qu’il n’existait aucune preuve de collusion entre sa campagne électorale et la Russie, ce que les deux hommes avaient refusé, selon le journal.

« Je reconnais que nous avons eu une rencontre avec le procureur spécial », a par ailleurs confirmé le sénateur démocrate de la commission du Renseignement, Mark Warner, confirmant que M. Mueller a rendu compte aux sénateurs de son travail.

« La fuite d’information du FBI concernant le président est scandaleuse, inexcusable et illégale », a réagi l’avocat de Donald Trump, Marc Kasowitz, sans se prononcer sur le fond.

« Fuites illégales »

La présidente du Comité national du Parti républicain, Ronna McDaniel, a affirmé pour sa part que les informations du Washington Post étaient infondées et « ne changent rien ».

« Il n’y a toujours aucune preuve d’obstruction, et les responsables actuels et passés des services de renseignement ont répété qu’il n’y a eu aucun effort pour bloquer l’enquête de quelque façon que ce soit. Le seul crime, ici, ce sont les fuites illégales a répétition », a déclaré Mme McDaniel dans un communiqué.

Donald Trump, dont la jeune présidence est empoisonnée par l’ombre de cette affaire, s’était félicité la semaine dernière des déclarations de James Comey, ancien chef du FBI qu’il a limogé début mai. Ce dernier a affirmé lors d’un témoignage très à charge que le président américain ne faisait pas l’objet d’une enquête de la police fédérale dans le cadre de l’affaire russe à l’époque où il était en place.

Selon les sources du quotidien, « l’enquête sur le président pour obstruction à la justice a commencé quelques jours après que Comey a été limogé le 9 mai ». Robert Mueller avait été nommé procureur spécial pour garantir l’indépendance de l’enquête la semaine suivante, le 17 mai.

Selon le code des Etats-Unis (US Code), qui rassemble l’ensemble des lois fédérales américaines, « quiconque essaye, de manière corruptrice, (…) d’influencer, d’entraver ou d’empêcher la bonne administration de la justice, doit être puni ». Le délit est passible d’une peine d’emprisonnement n’excédant pas cinq ans.

Les experts jugent peu probable que le ministère de la Justice prenne l’initiative d’inculper un président en exercice, même si l’enquête de M. Mueller conclut à une obstruction à la justice de la part de M. Trump. Mais une telle éventualité mettrait la pression sur le Congrès, à majorité républicaine, pour qu’il déclenche une procédure politique de destitution (« impeachment ») contre le président.

Les procédures d’impeachment lancées contre les présidents Bill Clinton en 1998 et Richard Nixon en 1974 se basaient toutes deux sur des accusations d’obstruction à la justice.

Le Quotidien / AFP