Le bilan des attentats de Londres s’est alourdi hier, alors que Téhéran faisait elle-même les frais de la folie terroriste. Pas un jour sans qu’un attentat ne soit perpétré dans le monde, et notre capacité à ingérer toutes ces atrocités a atteint depuis un moment son maximum. Fini le temps des larmes, de l’indignation, des manifestations de solidarité, tout ça n’est devenu que tristement banal. C’est d’autant plus horrible que pour les familles la douleur reste la même, celle d’avoir perdu un proche qui se trouvait au mauvais endroit au mauvais moment. Même si l’on relativise en pensant qu’on aura beaucoup plus de chances de mourir d’une maladie cardio-vasculaire ou d’un cancer, la peur s’instaure peu à peu dans le quotidien. Aller à un concert, sortir dans un bar un samedi soir n’est plus si anodin.
Il y a peu de chances que les terroristes arrivent à changer nos habitudes, la photo du Londonien fuyant les lieux de l’attentat en s’agrippant à sa pinte de bière en est tout un symbole. Les politiques risquent par contre bien d’être changées sur le long terme. À la veille d’une élection majeure pour son pays, la Première ministre britannique, Theresa May, a déclaré que «si les lois relatives aux droits humains se mettaient sur notre route pour tacler le terrorisme et l’extrémisme alors nous changerons ces lois». Lutter contre le terrorisme et l’extrémisme ne doit-il justement pas se faire au profit des droits humains? Si les droits humains sont des entraves, alors pourquoi doit-on se battre? Les propos de Theresa May font froid dans le dos. Cela prouve que, malgré tout, les terroristes arrivent à instiller de la peur et à forcer les politiques à plus de populisme pour gagner les élections. Reste à voir si l’émotion provoquée par ces vagues d’attentats aura des conséquences dans les urnes. À court terme, bien sûr, les conservateurs britanniques veulent donner l’image d’une main ferme face à la menace terroriste. Un calcul politicien qui se tient. À long terme, les Britanniques ne devraient pas en ressortir grandis si les droits humains devenaient de simples obstacles sur le chemin de la sécurité.
Audrey Somnard (asomnard@lequotidien.lu)