Est-il étonnant que plus de 70 ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, les disputes, querelles et susceptibilités nationales ne soient toujours pas surmontées ? Les origines du mal se trouvent dans les tabous érigés par la génération conformisante de l’après-guerre : «Nous construisons un nouveau pays, et nous n’avons pas les nerfs de nous laisser dévier dans cette trajectoire par des banalités.» D’autant plus qu’on croyait pouvoir clamer haut et fort le mythe erroné : «Tous les Luxembourgeois ont été des résistants (Pierre Dupong, homme d’État CSV)».
Non. Aujourd’hui, nous n’allons pas dresser l’inventaire des tabous et des malentendus historiques nationaux :
Les détracteurs du gouvernement en exil, parmi eux beaucoup de militaires qui avaient rejoint les forces alliées armées au Royaume-Uni, n’ont pas été des putschistes;
En même temps, les membres du gouvernement en exil n’étaient pas des traîtres à la cause grand-ducale;
Tous les enrôlés de force n’étaient pas des volontaires de guerre qui se sont permis des crimes de guerre;
Tous les combattants volontaires de la guerre civile en Espagne n’étaient pas des communistes;
Les communistes n’adhéraient pas tous inconditionnellement au traité de non-agression;
Tous les israélites n’étaient pas anticommunistes ou sionistes;
Tous les Allemands n’étaient pas des collaborateurs ou profiteurs de guerre;
Les curés n’étaient pas tous des délateurs.
Qui empêche les passeurs de mémoire de la nouvelle génération de saisir la chance de surmonter leurs tabous?
Jean Rhein