Le Quotidien Indépendant Luxembourgeois
Porte-drapeau luxembourgeois aux Jeux de Rio, Joël Wagener a été victime d’un accident lors d’un semi-marathon en handbike, dimanche en Allemagne. Il revient sur cet évènement.
Sa voix ne laisse percevoir aucun traumatisme. Pas la moindre frayeur. Juste un agacement certain : «S’il ne s’était pas enfui, il aurait pu faire jouer son assurance. Là, ça risque de lui coûter beaucoup plus cher…» Victime d’un accident, dimanche au semi-marathon de handbike à Wuerzburg, Joël Wagener souffre d’une plaie importante à la jambe gauche et d’un gros hématome à l’épaule droite. Pour ce qui est de la tête, tout va bien : «Je n’ai pas eu peur, je n’en ai pas eu le temps. Le gars, je ne l’ai vu qu’au tout dernier moment…»
Dimanche, 14h30. Joël Wagener et Luciano Fratini, qui ont tous deux disputés les Jeux paralympiques de Rio, mènent la chasse derrière le groupe de tête qui se trouve à une trentaine de mètres. À cet instant, sur leurs handbikes, ils fendent l’air aux alentours de 45-50 km/h. À la sortie d’un virage, en pleine descente, deux cyclistes traversent la chaussée. Le choc est inévitable, la roue avant de Joël Wagener percute à pleine vitesse le cycliste. «Sous le choc, témoigne Luciano, j’ai vu le gars et le vélo s’envoler.» Souffrant d’une paraplégie incomplète, Wagener a mis quant à lui quelques instants avant de se rendre compte de la gravité de la situation. Je voulais qu’on m’aide à me relever pour repartir. Mais une secouriste m’a dit : « Non, c’est fini, regardez. » Et là, j’ai vu du sang sur la route. Ma jambe était ouverte sur 25 cm ! Je voyais mon os…»
La police a lancé un avis de recherche
Également touché, le cycliste a néanmoins trouvé la force nécessaire pour prendre la poudre d’escampette, comme le raconte Fratini : «J’ai tout de suite dit qu’il fallait relever son identité, mais il a tout d’abord prétexté ne pas se sentir bien. Avec l’aide de sa copine, il s’est donc éloigné un petit peu et a profité que je discutais avec un pompier pour s’enfuir.» Une fuite qui pourrait ne pas s’éterniser puisque la police locale a lancé un avis de recherche dans trois quotidiens allemands mais aussi dans les hôpitaux de la région.
De l’hôpital, Joël Wagener en est donc ressorti avec une belle balafre sur sa jambe gauche. «Ça va, de toute façon, je ne sens rien», lâche-t-il dans un sourire avant d’évoquer, avec inquiétude cette fois, l’état de sa monture : «Le bac en carbone, sur lequel je suis allongé, est cassé. Un handbike comme celui-là, fait sur mesure, coûte 16 000 euros !» Le porte-drapeau du Luxembourg va devoir patienter avant de reprendre le chemin de l’entraînement. «Outre la question du matériel, explique l’intéressé, je ne peux pas attacher la jambe à la fourche. Je vais donc faire du rouleau.»
Charles Michel
« Quand tu as la tête à hauteur du pare-choc… »
L’accident dont a été victime Joël Wagener a quelque peu le don d’énerver Luciano Fratini, président du Luxembourg Handbike Team, qui est régulièrement confronté à l’incivilité des autres usagers.
«À chaque sortie d’entraînement, je me fais peur en moyenne deux ou trois fois», confie le Luxembourgeois bien placé pour parler de la difficile cohabitation entre les automobilistes et autres cyclistes ou handbikers. «Certains s’amusent, en passant à notre hauteur, à mettre un coup de klaxon. Quand tu as la tête à la hauteur du pare-choc, je peux vous dire que ça fait un drôle d’effet…», raconte le Luxembourgeois, pour qui de tels agissements relèvent de la bêtise.
Afin de sensibiliser les usagers de la route, Fratini a une petite idée : «Les mettre sur des handbikes. Je pense qu’ils réfléchiraient à deux fois avant de klaxonner ou de nous faire des queues de poisson…»
