À pied, à moto, à dos d’ânes ou en voiture, des centaines d’habitants, parfois des familles entières, se ruent vers les bas-fonds de Kafa-Koira, au sud de Niamey, la capitale du Niger. La raison: la fièvre de l’or.
De bouche à oreille, la rumeur s’est répandue comme une traînée de poudre : le site à ciel ouvert situé non loin de l’aéroport recélerait de l’or. « Je viens tenter ma chance », explique Kadri Issia, pioche à l’épaule, venu du quartier Dan-Zama, à une dizaine de kilomètres plus au nord.
Le site est situé dans un cours d’eau desséché, protégé par des arbustes épineux, et atteignable par une piste défoncée. Habituellement désert, il s’est transformé en deux jours en un véritable quartier d’affaires où se côtoient vendeuses de nourriture, d’eau fraîche, de vieux sacs, de cordes, de seaux et d’outils à creuser.
Un détachement de policiers a même été envoyé pour sécuriser les lieux. Pourtant, l’article 2 du Code minier du Niger interdit toute « appropriation privée (…) de gîtes naturels de substances minérales ou fossiles contenues dans le sous-sol ou en surface » qui sont « la propriété de l’Etat ».
« Je me suis réveillé lundi matin, c’était noir de monde autour de ma maison », témoigne Issaka Abdou, un riverain.
Sous un soleil de plomb et malgré les risques d’éboulements, plus d’un millier d’hommes et de femmes, majoritairement jeunes, armés de pioches, de barre à mines, de pelles, de coupe-coupes, s’acharnent sur les flancs de la crevasse longue d’une centaine de mètres, dans l’espoir de tomber sur un filon.
Certains creusent la terre à mains nues. Quelques uns brandissent des détecteurs de métaux. Les traits tirés, Zakari Issa fait partie des premiers arrivants. « Je creuse depuis deux jours mais pas encore d’or en vue », hurle cet homme de 42 ans, du fond d’un puits de deux mètres.
Quelques mètres plus loin, Ali, un adolescent, veille sur les réserves d’eau et surtout de petits sacs remplis de sable que son père a fait remonter d’un trou fraîchement creusé.
« Ces sacs contiennent peut-être de l’or. Nous les transporterons à la maison pour un minutieux tamisage », murmure le père d’Ali.
A l’autre extrémité du site, deux colosses pilonnent des roches à l’aide d’une barre à mine. « J’ai trouvé ! », jubile, soudain, un cinquantenaire qui s’empresse de dissimuler un minuscule métal jaunâtre dans la poche de son pantalon.
Le métal jaunâtre est « peut-être de l’or » ou « peut-être de la pyrite de fer », relativise un géologue. Les novices « confondent » souvent les deux métaux « à cause de leur ressemblance », note-t-il. Mais, croyant en leur chance, ils sont nombreux à continuer d’acheminer en ville des dizaines de sacs de gravats à bord de camionnettes.
Mardi, d’autres chercheurs ont pris la relève, sur des collines environnantes où « une pépite aurait été ramassée », souffle un conducteur de moto-taxi.
Les découvertes de sites aurifères sauvages sont monnaie courante au Niger, pays qui produit depuis 2004 de l’or en quantité industrielle dans sa partie ouest, proche du Burkina Faso.
Dans cette zone, des milliers de Nigériens, Burkinabés, Maliens et Sénégalais écument des sites aurifères artisanaux depuis les années 90.
Plus au nord, dans le désert, le gouvernement a fermé en février 2017 un site aurifère découvert en 2014 dans le Djado et où travaillaient « plus de 20.000 » Nigériens, Tchadiens, Libyens et Soudanais, selon les autorités locales.
Officiellement, le site de Djado est fermé pour des raisons de « sécurité » en lien avec des actes « terroristes » ou de « banditisme » commis dans la zone frontalière de la Libye et du Tchad.
Le gouvernement, qui a promis de rouvrir prochainement le site, a également décidé d’attribuer un permis de recherche à la Société des patrimoines des mines du Niger (SOPAMIN, société publique).
Le Quotidien / AFP