Après un début de vol habituel, l’un des deux pilotes de l’Airbus A320 de Germanwings qui s’est écrasé mardi dans les Alpes françaises, avec 150 personnes à bord, a quitté le cockpit et a été dans l’impossibilité d’y retourner pendant la chute de l’appareil.
L’une des deux boites noires de l’A320 de Germanwings, présentée le 25 mars 2015 par le bureau d’enquête et d’analyse. (Photo : AFP)
Ces informations à l’AFP émanant d’une source proche de l’enquête ayant eu connaissance de la teneur des enregistrements de la boite noire, confirment celle initialement dévoilée par le New York Times, et marquent une nette accélération de l’enquête après l’accident qui a suscité une émotion considérable dans toute l’Europe. Le procureur de la République de Marseille, Brice Robin, en charge du dossier du crash, a indiqué jeudi qu’il donnerait une conférence de presse à 12H30, « dans un salon de l’aéroport de Marignane », près de Marseille.
« Au début du vol, on entend l’équipage parler normalement, puis on entend le bruit d’un des sièges qui recule, une porte qui s’ouvre et se referme, des bruits indiquant qu’on retape à la porte et il n’y a plus de conversation à ce moment-là jusqu’au crash », a indiqué la source proche de l’enquête. Les deux pilotes s’exprimaient en allemand. Et, à la fin du vol, les alarmes indiquant la proximité du sol retentissent, a indiqué cette même source qui n’était pas en mesure de dire si c’était le commandant de bord ou le copilote qui a quitté la cabine de pilotage.
Ces informations proviennent de l’audition par les enquêteurs de la boîte noire enregistrant les sons dans le cockpit. Le cockpit voice recorder (CVR) a été retrouvé mardi quelques heures après l’accident et sa lecture a été effectuée mercredi en fin de journée. Dans la nuit, la compagnie allemande Germanwings a fait savoir dans un communiqué qu’elle n’avait pas eu confirmation de la part « des autorités compétentes » de ces informations.
> « Hélitreuillage des victimes »
Elles interviennent alors que les premiers corps ou restes des 150 victimes de l’accident de l’Airbus de Germanwings, filiale de Lufthansa, ont été hélitreuillés mercredi par les équipes de secours sur le lieu du drame, près de Digne dans les Alpes-de-Haute-Provence où sont attendus jeudi des familles de victimes, venant surtout d’Allemagne et d’Espagne. Plusieurs centaines de personnes, familles ou proches des victimes, doivent être accueillies dans les chapelles ardentes dressées dans deux localités proches du lieu de l’accident, Seyne-les-Alpes et Le Vernet.
Au moins deux grandes tentes en plastique blanc, totalement opaques et closes, étaient dressées jeudi matin devant la chapelle ardente de Seynes-les-Alpes, a constaté une journaliste. Selon des gendarmes chargés de sécuriser les lieux, les tentes, « qui ont été montées dans la nuit », sont destinées « à accueillir les familles et à préserver leur intimité ». Éclairé par de puissants projecteurs visibles à plusieurs kilomètres, le terrain était désert, jeudi, à l’aube. Deux avions devaient partir de Düsseldorf et Barcelone pour Marseille afin de permettre aux proches des disparus de se rendre à proximité des lieux de la catastrophe. Deux autocars en provenance d’Espagne étaient aussi attendus.
Mercredi, les dirigeants français, allemand et espagnol François Hollande, Angela Merkel et Mariano Rajoy se sont recueillis sur le lieu du crash. L’Allemagne et l’Espagne qui ont mis leurs drapeaux en berne mercredi sont les deux pays les plus touchés par le drame, avec respectivement 72 et 51 victimes. Au nord-ouest de l’Allemagne, à Haltern, des roses et des bougies jonchaient les marches de l’établissement scolaire où étaient scolarisés 16 adolescents qui ont disparu dans l’accident.
Mercredi soir, plusieurs minutes de silence ont été observées avant des matchs de football du Bayern Munich, du Real Madrid et d’un match amical Allemagne-Australie à Kaiserslautern. Sur le lieu de l’accident, à 1 500 mètres d’altitude dans une zone difficile d’accès, plus de 300 gendarmes, 280 policiers, une centaine de sapeurs-pompiers, 70 chasseurs alpins venus de Gap, ainsi qu’une dizaine de médecins-légistes, sont mobilisés pour les opérations de recherche et d’enquête, qui doivent reprendre jeudi matin.
> L’avion a volé jusqu’au bout
L’identification des corps prendra « des jours et même des semaines », a prévenu le procureur de la République de Marseille Brice Robin. Interpol a envoyé une équipe de spécialistes, pour aider à cette tâche. Sur l’explication du drame, « à ce stade, on ne ferme aucune hypothèse », avait indiqué mercredi le directeur du Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA) Rémi Jouty, précisant toutefois que l’avion n’avait pas explosé en vol, mais avait bien « volé jusqu’au bout » avant de se désintégrer en milliers de morceaux contre la montagne.
Mercredi matin, le ministre de l’Intérieur français avait indiqué que l’hypothèse terroriste n’était « pas privilégiée ». « Si les pilotes n’ont pas empêché l’avion d’aller s’écraser contre les montagnes, c’est que soit ils étaient inconscients ou morts, soit ils ont décidé de mourir, soit on les a obligés à mourir » avait résumé un expert. Selon une autre source proche du dossier, interrogée dans la nuit de mercredi à jeudi le copilote de l’appareil était entré « récemment dans la compagnie » allemande Germanwings, filiale de Lufthansa, « fin 2013, avec à son actif quelques centaines d’heures de vol ». Sa nationalité n’est par ailleurs pas connue avec précision, a poursuivi la même source.
AFP