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Voiture du futur : constructeurs et télécoms intensifient leur collaboration


Le président et directeur général de Liberty Global Mike Fries lors d'un discours au Congrès mondial de la téléphonie mobile (MWC), à Barcelone le 28 février 2017. (Photo : AFP)

Lutte contre les hackers, fiabilité de la connexion internet, casse-tête éthiques et juridiques : la voiture du futur fait face à de multiples défis auxquels les constructeurs et l’industrie télécom tentent de répondre en intensifiant leur collaboration.

Après une timide apparition en 2016, les prototypes de voitures connectées ont envahi cette année les allées du Congrès mondial de la téléphonie mobile (MWC), qui se tient jusqu’à jeudi à Barcelone. De multiples démonstrations sont proposées: payer son essence depuis le tableau de bord d’une Jaguar, recevoir prévisions de trafic et recommandations de restaurant via l’assistant numérique du simulateur Seat. Des vidéos montrent des camions Volvo lancés sur l’autoroute, avec le siège du conducteur vide.

Industriels des télécoms et de l’automobile ont un double objectif: la voiture connectée, futur «smartphone sur roues» qui permettra de bénéficier de multiples applications. Et à plus long terme, la voiture autonome, sans conducteur. Mais les obstacles restent nombreux. «Les voitures connectées posent un sérieux problème en termes de cybersécurité», a reconnu Jeff Massimilla, chargé de la cybersécurité chez General Motors, lors d’un débat au MWC.

La grande crainte est qu’un hacker mal intentionné puisse s’emparer à distance d’une voiture connectée en piratant son système informatique, comme il le ferait pour un ordinateur. Des voitures connectées ont été piratées pendant des tests en 2015. Et les attaques informatiques contre des objets connectés ont été multipliées par 4,5 entre 2015 et 2016, selon des chiffres présentés lundi par Masayoshi Son, PDG du géant japonais des télécoms Softbank.

Sur ce plan, «les équipementiers automobiles sont considérablement en retard (…) Il y a un fossé entre les objectifs de l’industrie et le stade où ils en sont aujourd’hui», analyse Ofer Ben-Noon, PDG d’Argus Cyber Security. «Nous ne pouvons pas y arriver seuls», reconnaît Ogi Redzic, chargé de la voiture connectée chez Renault-Nissan, qui s’est allié à Microsoft en septembre. Volkswagen a racheté il y a trois ans à Blackberry une équipe de 200 ingénieurs, pour développer en interne la technologie connectée.

Qui financera ?

Autre enjeu crucial: la puissance du réseau internet. «Quand les voitures (connectées) seront nombreuses sur les routes, il y aura un problème de débit et de bande passante pour faire fonctionner le système», souligne Guillaume Prunel, analyste chez Deloitte. Avec à la clé un risque d’accident pour les voitures sans conducteur. Tous les espoirs sont donc placés dans la 5G, future technologie mobile annoncée pour 2020 qui doit permettre de connecter bien plus d’objets que la 4G actuelle. PSA, Orange et Ericsson vont tester des voitures 5G, comme le fait déjà BMW avec l’opérateur coréen SK Telecom.

«La voiture 5G réagit immédiatement en cas d’accident et transmet l’information aux voitures qui l’entourent», explique Changsoon Choi, du centre de recherche de SK Telecom. Le passage à la voiture autonome nécessitera aussi l’amélioration des capteurs lui permettant de se repérer et l’établissement de cartes numériques encore plus précises que celles destinées aux humains, pour pouvoir anticiper les obstacles très à l’avance En terme d’infrastructures, «il y a énormément d’investissements à faire pour que le véhicule puisse communiquer avec les parkings, les feux rouges, les panneaux routiers…On n’a toujours pas imaginé qui financera ce genre de choses», avertit Mouloud Dey, directeur innovation chez SAS.

Sans compter les dilemmes moraux et la responsabilité juridique. La voiture autonome sera-t-elle configurée pour épargner à tout prix la vie de son conducteur, même s’il faut pour cela par exemple écraser des piétons? Qui sera responsable en cas d’accident? Le fabricant de la voiture, son propriétaire ou l’opérateur du réseau internet? «On a une certaine indulgence envers les fautes de conduite humaine, qu’on aura pas envers la machine. Il faudra se prononcer sur la vie et la mort de certains (…) Je ne sais pas qui au nivau réglementaire aura envie de prendre cette responsabilité», analyse Guillaume Prunel.

La voiture du futur pourrait être techniquement prête à fonctionner avant que ce casse-tête réglementaire soit résolu, estiment plusieurs analystes.

Le Quotidien/AFP