Les autorités américaines sont lancées en Californie dans une course contre la montre pour tenter de réparer, avant l’arrivée des prochaines pluies, le plus haut barrage des Etats-Unis. Près de 200.000 personnes restaient lundi sous ordre d’évacuation sans savoir quand elles pourraient réintégrer leurs domiciles.
Le réservoir du barrage d’Oroville, situé à 120 km au nord de Sacramento, la capitale de la Californie, est plein à ras bord après des semaines de fortes pluies. Si le niveau du Lac d’Oroville a baissé ces dernières heures, faisant diminuer les risques immédiats d’inondations « catastrophiques » évoqués par les autorités, ces dernières s’inquiétaient des fortes pluies annoncées à partir de jeudi. Elles « ne vont pas donner (aux autorités) le répit dont elles ont besoin » pour réparer les problèmes des déversoirs du barrage, s’est inquiété Alan Hayes, porte-parole de l’autorité fédérale de l’atmosphère et de l’océan (NOAA).
Tempête prévue
« Nous avons une tempête de pluie qui arrive jeudi et vendredi mais (elle) semble plus faible que celle des derniers jours, puis encore plusieurs tempêtes prévues » samedi et en début de semaine prochaine, a expliqué Bill Croyle, commandant par intérim du DWR de Californie, lors d’une conférence de presse lundi.
Ces précipitations pourraient de nouveau remplir dangereusement le lac et mettre le barrage, dont les déversoirs d’urgence sont endommagés, sous forte pression. « L’infrastructure tient très bien pour le moment même si elle est endommagée », a affirmé Bill Croyle. En attendant, « l’ordre d’évacuation reste en vigueur », a indiqué le shérif du comté de Butte Kory Honea en conférence de presse lundi, sans pouvoir dire quand il sera levé. « Je reconnais que c’est déplacer beaucoup de gens et c’est très difficile pour notre communauté », a-t-il ajouté.
Le barrage de 235 mètres de haut n’est pas lui-même en danger, selon le département des ressources en eau de Californie, mais les inquiétudes concernent le déversoir auxiliaire d’urgence en raison de l’érosion du haut d’un mur bétonné qui a commencé samedi à laisser échapper de l’eau. Les autorités évaluent aussi la solidité du déversoir principal, également endommagé.
Un ordre d’évacuation d’urgence a été lancé dimanche concernant 188.000 personnes, et beaucoup ont passé la nuit dans des abris d’urgence improvisés dans les gymnases, des églises ou des bases militaires. Quelque 580 détenus de la prison du comté de Butte ont dû être déplacés, entraînant une opération délicate sous haute sécurité.
En service depuis 1968
Jerry Brown, gouverneur de Californie, à l’ouest des Etats-Unis, a décrété dimanche l’état d’urgence afin de pouvoir mobiliser toutes les ressources gouvernementales de l’Etat, et le Pentagone a prévenu que des militaires pourraient être déployés si besoin. « Nous sommes prêts à déployer (…) l’armée fédérale, vite si besoin », et 23.000 militaires de la garde nationale en Californie sont en alerte, a déclaré un porte-parole du Pentagone. C’est la plus forte mobilisation de la Garde nationale en Californie depuis les émeutes de Los Angeles en 1992 après le verdict dans l’affaire Rodney King.
Les autorités laissent échapper de l’eau au rythme de 3.000 m3 par seconde et veulent que le niveau du Lac d’Oroville diminue de 15 mètres avant les prochaines pluies, ont-elles indiqué. Des images télévisées montraient des torrents d’eau grondante s’écoulant dans une gorge vers un réservoir secondaire, également plein, avant d’aller dans la rivière Feather qui traverse Oroville. Les déversoirs d’urgence ont été renforcés à la hâte par des sacs de pierres posés à l’aide de grues et hélicoptères, d’après des images télévisées.
Plusieurs médias américains soulignent que trois associations de défense de l’environnement, The Friends of the River, the Sierra Club et le South Yuba Citizen League, avaient déposé une motion fédérale il y a douze ans affirmant que le barrage d’Oroville, en service depuis 1968, n’était pas aux normes de sécurité. Ron Stork, de Friends of the River, a déclaré à CNN que son organisation a « pressé les autorités fédérales et californiennes de renforcer les déversoirs » en les bétonnant: « notre argument était que sans un déversoir adéquat, la colline » où il se trouve « risque de s’éroder et d’entraîner des inondations catastrophiques ».
Le Quotidien / AFP