Traditionnellement, les chambres d’hôtels à la journée se nichaient dans de petits hôtels, parfois sordides. Depuis deux ans, des centaines d’établissements, trois ou quatre étoiles en France, vides à 70% en journée, s’ouvrent aux voyageurs en transit, aux hommes d’affaires mais surtout aux couples.
Une chambre pour une, deux ou trois heures, dans un créneau horaire de 12h à 18h. Cette demande existe depuis la nuit des temps mais Dayuse.com, site de réservation de chambre d’hôtels en journée, suivi par d’autres (Poz’in, Soroom, etc..), ont chamboulé le marché hôtelier français. Le site Dayuse.com se vante de capter « 70% du volume de ce marché ».
Créée à Lille en 2010 avec un capital de 4.000 euros, la start up travaille avec plus de 650 hôtels en France, dont 430 à Paris et en Ile-de-France. Le site est présent dans 18 pays, 150 villes du monde, et souhaite poursuivre son développement après une levée de fonds de 15 millions d’euros à l’automne 2015.
La société, qui bénéficie du soutien de professionnels reconnus tels que le co-fondateur de Accor, Paul Dubrule, ou encore, Jacques-Antoine Granjon, créateur de Vente-privée, a enregistré « un doublement du chiffre d’affaires, passant de 10 millions en 2015 à 20 millions en 2016 », se félicite David Lebée, fondateur de ce site.
« La location de chambres d’hôtels a toujours été là, a toujours existé. L’offre, proposée par ces sites ne fait que structurer ce marché, comme Airbnb a pu structurer la location d’appartements entre particuliers. Ces sites sont un intermédiaire, prennent une commission au passage », résume Vanguelis Panayotis, directeur du développement du cabinet d’expertise MKG Group.
« On est parti du constat que 70% des chambres sont vides la journée. On monétise donc les actifs dormants, en renforçant l’industrie hôtelière, sans pour autant la perturber, contrairement à Airbnb, Uber, qui ont cassé les modèles existants », se défend le fondateur du site Dayuse.com.
Mais qui sont les clients de ces plages horaires diurnes ? Pour David Lebée, « la clientèle se répartit entre les voyageurs en transit à 30%, les réunions d’hommes d’affaires à 30%, et enfin les familles et les couples, à hauteur de 40% », affirme-t-il.
Alors que les sites visent aussi les couples réguliers – en quête d’une escapade romantique ou trop à l’étroit chez eux – ces créneaux horaires attirent « clairement une forte proportion de couples, illégitimes en très grande partie », estime M. Vangelis.
Même son de cloche chez Christophe Sauvage, fondateur et directeur général d’Elegancia Hotels, qui compte 17 boutiques-hôtels à Paris, répertoriés sur Dayuse.com. « La clientèle est majoritairement composée de couples illégitimes. Cet usage est aussi vieux que l’hôtellerie et les fondateurs de Dayuse.com ont eu la bonne idée de mettre en place une plateforme technologique à disposition de ces clients », note-t-il.
Quant aux tarifs, ils sont « de 35% et jusqu’à 75% inférieurs à ceux de la nuitée », selon M. Lebée. « Par exemple, une chambre double qui se vend normalement 220 euros la nuit va partir à 90 euros pour la journée, entre 12h et 15h, sur Dayuse.com », assure l’hôtel Amour, situé près du célèbre quartier Pigalle à Paris.
Ce type de location est aussi un complément de revenus pour les hôteliers, dans un contexte de baisse de fréquentation touristique après les attentats de 2015 et 2016 en France. « C’est une opportunité d’agréger une autre source de revenu mais il faut être honnête, ça reste à la marge », tempère M. Sauvage, précisant que les établissements qui répondent le mieux à cette offre sont situés « près de la gare Montparnasse et de bureaux ».
Cette offre concerne majoritairement les hôtels trois ou quatre étoiles, beaucoup moins les établissements très haut-de-gamme.
« On a réfléchi un temps à se positionner sur ce genre de sites mais nous n’avons pas la demande. Les palaces abritent souvent des restaurants de renom, des rendez-vous d’affaires, qui occasionnent beaucoup de passage. Les personnes ne veulent peut-être pas être vues monter à l’étage des chambres en pleine journée », explique François Delahaye, directeur général du Plaza Athénée, palace parisien de l’avenue Montaigne.
Le Quotidien / AFP