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Yves Piron prend les rênes de l’OLAI


Yves Piron est le nouveau directeur de l’Office luxembourgeois de l’accueil et de l’intégration (OLAI), dont un audit avait révélé la gestion chaotique. Nouvelle tête, nouvelles ambitions.

Comment s’intéresse-t-on à l’accueil des réfugiés et à l’intégration des étrangers après avoir représenté le commerce de la capitale pendant de longues années ?

Yves Piron : On me connaît surtout comme directeur de l’Union commerciale de Luxembourg pendant sept ans, c’est vrai. Mais j’ai officié pendant trois ans auprès de Médecins sans frontière et une de mes missions consistait à contrôler l’utilisation des dons sur le terrain et à suivre les projets. Je me suis donc souvent rendu en Afrique pour rendre ensuite des comptes aux donateurs. Certes, j’ai relevé le défi que proposait l’Union commerciale, mais je suis resté pendant neuf ans au conseil d’administration de MSF, poste que je viens de quitter récemment en prenant mes fonctions à l’OLAI. On connaît moins cette partie de mon parcours, mais elle explique aussi pourquoi j’ai envie de relever ce nouveau défi à l’OLAI. J’ai depuis longtemps appris à connaître le public dont je dois m’occuper aujourd’hui. On sait encore moins que je fus le premier attaché parlementaire du Luxembourg. À l’époque, je n’étais pas lié à une fraction mais à deux députés, René Kollwelter et Jeannot Krecké.

L’OLAI a une grande responsabilité dans la prise en charge des demandeurs d’asile. Comment abordez-vous votre nouvelle mission ?

Dans la loi de 2008 qui fixe les missions de l’OLAI, il est bien précisé que l’on parle de « responsabilité partagée » entre l’État, les autres ministères et les communes. Pourquoi parle-t-on de responsabilité partagée? Parce que les défis sont tellement énormes que notre équipe d’une soixantaine de personnes n’est pas à même de répondre seule à l’afflux des réfugiés.

D’autant que l’OLAI n’a pas comme seule mission l’accueil des demandeurs d’asile, mais également l’intégration des étrangers et la lutte contre les discriminations…

Oui, ce sont les trois grands axes de l’OLAI. En revanche, aujourd’hui, le défi de l’accueil des réfugiés est tel que les trois-quarts de nos personnels sont voués à cette seule mission. L’afflux massif de 2011 et 2012, qui a vu plus de 2 000 personnes arriver sur le territoire du Grand-Duché, n’est toujours pas absorbé aujourd’hui et se sont rajoutées quelque 1 000 nouvelles arrivées 2013 et 2014. Que le statut de réfugié leur soit accordé ou non, ces personnes sont toujours dans le réseau.

Comment gérez-vous alors le nombre de lits disponibles, sachant que vous n’en avez que 2 200 ?

L’OLAI gère en effet 2 200 lits répartis dans une soixantaine de foyers qui vont du petit foyer communal à l’hôtel auberge en passant par les foyers étatiques. Or, près de la moitié des personnes qui les occupent ont été déboutées et, selon la loi, devraient quitter le territoire. Mais elles sont restées dans ces structures parce que nous n’avons pas développé suffisamment tôt un processus de retour. Nous avons des retours volontaires qui existent, certes, mais nous avons surtout tous ces candidats réfugiés déboutés qui restent en dépit de tout. Parmi eux, il y a des personnes qui ne peuvent plus retourner dans leur pays – qui ne les accepte plus – comme l’Algérie par exemple. Cette population est là et ne tombe plus vraiment sous la compétence de l’OLAI, qui est la prise en charge des demandeurs d’asile le temps de l’instruction de leur dossier. Si la réponse est négative, c’est alors le ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration qui prend le relais pour organiser le retour, mais il y en a tellement qu’il n’arrive pas à suivre. Mais si la réponse est positive, comme c’est le cas pour 10 % de la population de nos foyers, se pose la question du relogement de ces 200 personnes, d’autant qu’il s’agit souvent de familles nombreuses.

Vous avez déclaré à nos confrères du Land que vous aviez entamé des discussions avec le Fonds du logement. Comment entendez-vous coopérer ?

Nous sommes effectivement en train de chercher une solution. D’un côté, nous avons besoin de places pour accueillir les demandeurs d’asile. Et, d’un autre côté, nous devons nous séparer des personnes qui ne sont plus censées y résider. Ceux qui ont obtenu le statut de réfugié sont plus vulnérables et nous étudions avec le Fonds du logement une solution pour ces gens-là. Si le Fonds construit, il doit avoir le réflexe d’intégrer des cellules plus grandes pour les familles nombreuses.

Vous comptez aussi redonner une seconde vie aux presbytères…

Leur avantage est d’être situé au cœur des villages et l’idée est d’y loger ceux qui ont obtenu le statut de réfugié. C’est une piste que je trouve assez intéressante. Ce mois-ci, le gouvernement va accueillir 46 nouveaux réfugiés syriens. Ce sont des personnes qui ont directement le statut de réfugié. Nous cherchons des logements dans les différentes communes pour le mois d’août afin que les enfants puissent être directement scolarisés à la rentrée.

Ce sont des personnes très vulnérables…

Oui, ils viennent de pays en guerre et leurs traumatismes nécessitent une autre prise en charge. C’est une directive européenne qui nous impose cet encadrement particulier. Mais dans la loi qui transpose le « paquet asile », nous avons aussi prévu une augmentation des effectifs de 19 personnes, sinon ce n’est plus possible. Nous avons déjà rendu visite à la commission parlementaire à quatre reprises avec la ministre Corinne Cahen pour débattre de l’OLAI. La semaine prochaine, nous y retournons pour débattre encore de ce projet de loi. Nous espérons que ce débat sera porté aussi dans la société civile pour trouver un consensus national sur l’accueil des réfugiés.

Retrouvez cet entretien en intégralité dans Le Quotidien papier de ce lundi.