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« A tout jamais », pour éveiller les consciences sur la fin de vie (Vidéo)


Alors que le Parlement mène le débat en France sur la fin de vie, le film A tout jamais, sorti mercredi, raconte l’histoire du premier Belge à avoir utilisé la loi sur l’euthanasie dans son pays, une manière de sortir des discussions « abstraites », selon le réalisateur Nic Balthazar.

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Le film raconte le combat durant sept ans de Mario Vestraete, trentenaire atteint de sclérose en plaques, pour faire passer la loi sur l’euthanasie en Belgique avant d’y recourir. (Photos : DR/Bodega films)

A Tout jamais (Tot altijd) est basé sur des faits réels : la vie et la mort de Mario Vestraete, trentenaire atteint de sclérose en plaques, qui s’est battu pendant sept ans pour faire passer la loi sur l’euthanasie en Belgique, avant d’en faire usage en 2002.

Ce film, sorti en 2012 en Belgique, arrive en France alors que l’Assemblée nationale a achevé dans la nuit de mercredi à jeudi l’examen de la proposition de loi sur la fin de vie, en acceptant de donner un caractère contraignant aux « directives anticipées », par lesquelles chacun peut stipuler à l’avance son refus d’un acharnement thérapeutique. L’Assemblée se prononcera par un vote solennel mardi sur le texte, ensuite examiné par le Sénat.

« Je suis extrêmement heureux que ce film sorte au moment où, dans les rubriques purement politiques, on parle d’une loi en France », a déclaré Nic Balthazar. « Ce film ne se veut absolument pas un pamphlet pro-euthanasie. Mais quand on a des discussions dans les assemblées, elles sont souvent menées de manière aseptisée. Avec ce film, on avait la chance d’amener une dimension humaine », ajoute le réalisateur flamand, dont c’est le deuxième film, et qui connaissait personnellement Mario Verstraete, ami proche de son frère.

« Comme j’ai pu vivre toutes les émotions de cette histoire, que je connaissais tous les gens impliqués, je me suis dit qu’il fallait faire le film », explique-t-il. Pour lui, cette histoire a aussi une « dimension historique », car la Belgique reste l’un des trois seuls pays européens, avec les Pays-Bas et le Luxembourg, à avoir autorisé l’euthanasie, par une loi adoptée en mai 2002. Selon les statistiques officielles, cinq personnes par jour ont opté pour une euthanasie en Belgique en 2013, soit 1 807 sur l’ensemble de l’année.

> « Blocage »

Le film, qui rentre dans l’histoire intime de Mario Vestraete, plein de joie de vivre avant le diagnostic de sa maladie, dépeint les convictions politiques et les souffrances qui l’amènent à militer pour le droit à mourir, puis à choisir de terminer sa vie entouré de ses proches.

Si le sujet est difficile, A tout jamais est loin d’être le premier film sur ce débat de société, largement traité au cinéma ces dernières années. La Belle Endormie (2013) de Marco Bellochio, inspiré du cas d’une Italienne morte après 17 ans de coma, Miele (2013) de Valeria Golino sur une jeune femme aidant des malades à mourir, Quelques heures de printemps (2012) de Stéphane Brizé ou Un voyage (2014) de Samuel Benchetrit sur le suicide assisté en Suisse, abordent tous ce sujet au cœur de notre époque, même si les œuvres restent souvent dures à financer et distribuer.

« On a bien senti que rien que le mot euthanasie crée un blocage », souligne Nic Balthazar, dont le film ne sort que dans trois salles dans l’Hexagone. « Ce n’est pas évident de se dire que l’on va faire ou voir un film sur quelqu’un qui va mourir », reconnaît-il. « Mais je crois qu’un film comme Amour de Michael Haneke par exemple a prouvé qu’on ne doit pas avoir peur des grandes émotions. »

Pour lui, surtout, « le cinéma peut amener un débat là où les débats politiques échouent. Si à la fin, on trouve toujours que cette loi est une mauvaise idée, bien volontiers. Mais je pense qu’on ne dira plus jamais que des gens comme eux ont tué leurs proches et n’avaient pas d’amour pour eux. »

AFP