Damien Raths, président de l’Avenir Beggen, poursuit des études de marketing. Il est allé trouver la FLF et les clubs de DN pour proposer de faire de la BGL Ligue… une marque !
Damien Raths s’est dit qu’il y avait moyen de vendre la Division nationale bien mieux qu’elle ne l’est à l’heure actuelle. (Photo : DR)
Tout a commencé dimanche dernier, à Niederkorn. Le speaker du stade diffuse une bande-son qu’il annonce vaguement être celle que la fédération entend diffuser à partir de la saison prochaine dans tous les stades de BGL Ligue. Intérêt plus que poli pour l’information : même si l’on parle là d’un championnat amateur, on devine, en germe, des envies de « branding » dans cette démarche peu courante de la FLF.
Cette dernière aurait-elle la volonté, lentement, d’emballer sa compétition phare dans un plus joli paquet cadeau ? Paul Philipp, président de l’instance, confirme : « Oui, nous avons eu des discussions avec une boîte de marketing et les clubs de DN. On a parlé d’un ballon commun, d’un hymne, mais aussi du calendrier et du fait d’avancer un match… On ne parle pas de remèdes miracles. Ce n’est pas parce qu’on mettra ça en place que les gens vont affluer au stade, mais si ça peut créer une marque Division nationale, pourquoi pas ? Ça ne peut pas faire de mal. »
Ceci étant dit, l’homme fort de la FLF nous a renvoyé vers l’homme qui était venu le démarcher, Damien Raths, président d’un Avenir Beggen en pleine reconquête (leader en Division 1 série 1) et qui, du haut de ses études en marketing à Düsseldorf, s’est dit, un jour, qu’il y avait moyen de vendre la Division nationale bien mieux qu’elle ne l’est à l’heure actuelle. Lui et sa boîte de marketing, Raths Sport Management, sont donc montés au créneau…
> Qu’est-ce que c’est que cette histoire de « branding »?
Damien Raths : Ouh là, attendez, il n’y a encore rien d’officiel. Ce qui s’est passé à Niederkorn (lire notre édition de lundi), c’était un malentendu, cela n’aurait pas dû arriver. Il y a encore des négociations en cours et il y aura une grande présentation. Vous comprendrez que je ne puisse rien dire.
> Expliquez-nous au moins la démarche…
On veut renouveler la DN pour la rendre plus… intéressante. Je trouve qu’il y a énormément de choses à faire au niveau du marketing, de l’emballage du produit. Notre football national n’est pas si mauvais. Or ce qu’il reflète, pour les gens d’ici, est négatif. Pour eux, c’est juste l’argent que l’on verse aux joueurs. Alors que d’autres sportifs sont très bien payés. Regardez le basket… Moi, je dis, il faut mieux le présenter aux gens, ce championnat!
> Ce n’est pas en faire un peu trop pour un championnat amateur ?
Si, peut-être, mais cela n’empêche pas d’essayer de mieux le vendre. Si ça peut rapporter plus de supporters et plus d’argent, il faut le faire. C’est pour ça, en tout cas, que je suis allé trouver la FLF.
> Quel était le constat ?
À Beggen, cette année, nous sommes allés au Melusina, un de nos sponsors, pour présenter les nouveaux joueurs, l’équipe et les nouveaux maillots. Alors oui, on n’est que Beggen, mais en DN, tous les clubs devraient le faire, ne serait-ce que par rapport à leurs supporters et leurs sponsors. Même en Regionalliga allemande, tous les clubs le font bien. Nous non. Pourquoi?
> Ben oui tiens : pourquoi ?
Les gens qui œuvrent dans les comités s’impliquent beaucoup, mais ils n’ont peut-être pas le sens du marketing. Or ils auraient tellement de possibilités! Notre sport, de ce point de vue, a une grosse marge de progression. Ne serait-ce que pour sa visibilité. Toutes les ligues pros autour de chez nous possèdent un site dédié à sa compétition. Au Luxembourg, il n’y a rien.
> Mais franchement, cela peut-il intéresser les gens ?
À Beggen, nous avons noué un partenariat avec le Standard de Liège. À chaque fois qu’on va là-bas, on nous dit qu’en province de Luxembourg, il n’y a aucun grand club et qu’il y aurait bien des gens qui pourraient peut-être s’intéresser à la BGL Ligue si elle était mieux vendue. On nous demande : « Pourquoi vous ne vous penchez pas là-dessus ? » La question n’est pas mal posée. Parce que c’est un fait : quand un spectateur vient voir un match de DN qui n’est pas intéressant, il repart en se disant que c’était nul. Quand on va voir un match à l’étranger, même si le match est tout aussi nul, ce qui arrive finalement souvent, on ne rentre pas en se disant que c’était nul. Parce qu’autour, on nous a raconté une histoire. Voilà : chez nous, c’est juste nul alors que chez les autres, ça passe. Même si le niveau de jeu est tout aussi bon.
> N’est-ce pas naïf de penser que cela peut changer quelque chose à la vision que les supporters ont du foot local ?
Des détails comme la musique n’ont pas un impact sur le spectateur mais sur l’image de la BGL Ligue. Et c’est crucial : l’élite d’un pays doit toujours se différencier des autres championnats. Franchement, hormis le niveau de jeu, si vous venez voir un match d’un club de Division 1 série 1, vous verrez exactement les mêmes choses que si vous allez voir un Jeunesse – F91 et je ne trouve pas ça normal.
> Et les clubs de DN avec qui vous avez discuté, ils trouvent ça anormal ?
Ils ont tous été intéressés. Le F91 comme Canach ! En tout cas, ils sont tous venus à la présentation.
> Ça va coûter de l’argent ce coup cosmétique ?
Grande question. C’est justement sur l’argent qu’on négocie encore. Mais avec peu d’argent, on peut faire beaucoup. Mais si on le fait, il faut voir vraiment la différence. Il faut créer une atmosphère. Le but, c’est de voir concrètement une différence, dans quelques années, sur les supporters et les sponsors. Le but, c’est de gagner de l’argent avec.
> Tout ça piloté par la FLF ou les clubs de l’élite ?
En Allemagne, les 36 clubs de Bundesliga (NDLR : des trois premières divisions) gèrent eux-mêmes leur marketing. Ici, on ne sait pas faire. C’est une question qui se posera.
> Mais alors de quoi parle-t-on? D’un « hymne » donc. D’un ballon commun à toutes les rencontres de BGL Ligue, dit Paul Philipp. Et quoi d’autres? Des panneaux publicitaires? Une mascotte? Un accroissement de ce qu’investit la fédération dans l’émission Goal ?
Dès que c’est officiel, vous le saurez. Nous ferons une présentation de ces projets. Mais il y a tout un chemin à parcourir. Cela ne peut pas se borner à deux ou trois petites choses. Oui, on pourrait commencer avec ça, mais pour aller plus loin dans les années à venir. Ne serait-ce que dans l’organisation des matches, notre rapport aux médias. Pourquoi ne pas imaginer, par exemple, de voir diffusés des matches de Division nationale pendant la saison? Chez nous, en tout cas, le marketing, ça devient très urgent.
> Vous n’avez pas peur que cela paraisse superficiel à certains tant cette culture n’est pas ancrée dans le foot local ?
C’est sûr que c’est ambitieux pour un pays comme le Luxembourg, mais nous n’avons reçu que des échos positifs. Et si on n’essaye pas, on n’aura jamais de résultats.
De notre journaliste Julien Mollereau