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Le Portugal en deuil fait ses adieux à Mario Soares


Un portrait géant de l'ex-président Mario Soares sur la façade du Parti socialiste portugais, le 8 janvier 2017 à Lisbonne. (Photo : AFP)

Des milliers de Portugais en deuil faisaient leurs adieux lundi à Mario Soares, considéré comme le «père de la démocratie», dont la dépouille mortelle devait traverser les principales artères de Lisbonne.

Le cortège funéraire devait partir dans la matinée du domicile familial devant lequel de nombreux anonymes ont déposé des roses rouges, symbole du Parti socialiste qu’il a fondé en 1973, pour se diriger ensuite vers l’emblématique monastère des Hiéronymites.

Dans son cloître, Mario Soares, alors Premier ministre et bientôt président, avait paraphé le 12 juin 1985 le traité d’adhésion du Portugal à la Communauté économique européenne, ancêtre de l’Union européenne. Le corps de l’ex-chef d’État, décédé samedi à l’âge de 92 ans, devait y être exposé en chapelle ardente jusqu’à minuit, pour donner aux Portugais la possibilité de se recueillir devant celui qui a marqué de son empreinte l’histoire politique du pays.

Mario Soares sera inhumé mardi après-midi au cimetière de Prazeres dans l’ouest de la capitale, où repose déjà son épouse, la comédienne et philanthrope Maria Barroso, disparue en juillet 2015. «La vie est toujours courte. Il faut vivre avec dignité et laisser un souvenir sympathique de ce qu’on a fait. Les gens continuent ainsi à vivre dans le cœur de leurs amis», disait-il lorsqu’il était interrogé sur la mort.

Barrage au communisme

«Mario Soares était un optimiste animé d’une grande joie», a témoigné le poète Manuel Alegre, dirigeant historique du PS et son ancien rival lors de la présidentielle de 2006, ajoutant qu’il avait été «l’ami de beaucoup d’écrivains». Le gouvernement socialiste dirigé par Antonio Costa a décrété trois jours de deuil national à partir de lundi et appelé «tous les citoyens» à rendre hommage à cette «grande figure de l’histoire portugaise contemporaine».

«Mario Soares restera dans l’histoire pour avoir dirigé l’opposition républicaine à la dictature de Salazar et avoir été le protagoniste de la transition vers la démocratie, contrant l’option communiste», a déclaré le politologue Antonio Costa Pinto. Son rôle aura été particulièrement décisif au lendemain de la Révolution des Oeillets de 1974, qui a mis fin à 48 ans de dictature, lorsqu’il a fait barrage aux tentatives de militaires proches du Parti communiste de prendre le pouvoir.

«C’est grâce à lui qu’on a échappé au communisme, les Portugais n’en voulaient pas», se souvient Maria Albuquerque, une commerçante de 76 ans venue signer un livre des condoléances au siège du Parti socialiste. «Mario Soares était un combattant infatigable pour la liberté qui a contribué à préparer le terrain à la Révolution», a relevé le colonel Vasco Lourenço, 74 ans, porte-parole des «capitaines d’avril» qui se sont soulevés lors du coup d’Etat militaire de 1974.

« Géant de la politique »

L’émotion suscitée par le décès de Mario Soares a transcendé les clivages politiques au Portugal. Le chef de l’opposition de centre droit, Pedro Passos Coelho, a ainsi exprimé dimanche son «profond respect pour le fondateur du Parti socialiste et son rôle dans l’avènement de la démocratie». La disparition de l’ancien chef d’Etat a également donné lieu à des hommages émus à travers le monde. Pierre Moscovici, commissaire européen aux Affaires économiques, a exprimé son «émotion et respect après la mort de Mario Soares, géant de la politique portugaise et figure marquante de la gauche socialiste européenne».

«Ami de cœur, je suis en larmes», a twitté le philosophe français Edgar Morin, 95 ans: «Mario Soares a combattu la dictature de Salazar et empêché la dictature stalinienne au Portugal». Le président du Cap-Vert Jorge Carlos Fonseca s’est dit, lui, «attristé de voir disparaître une grande figure de l’histoire du Portugal et de la démocratie européenne». Tout comme son homologue brésilien Michel Temer, il a annoncé sa venue à Lisbonne pour assister aux funérailles d’État mardi.

Le Quotidien/afp