Une mère alcoolique, un père criblé de balles alors qu’il n’a que 5 ans : à des années-lumière de son enfance à Buenos Aires, où il a connu la misère dans la banlieue violente de Fort Apache, l’Argentin Carlos Tevez va devenir à Shanghai le footballeur le mieux payé au monde.
Carlos Tevez a été adopté par un oncle qu’il appelle papa, Segundo Tevez, son sauveur. Grâce à lui, il a échappé miraculeusement au tragique destin de ses amis et voisins de quartier, ayant basculé pour la plupart dans la délinquance. Son meilleur ami, qui avait tué des policiers lors d’un braquage de casino, s’est donné la mort d’une balle dans la tête pour éviter de se faire arrêter.
Un matin de novembre 1989, alors que le petit garçon a presque 6 ans, l’entraîneur des équipes de jeunes du club All Boys, Norberto Propato, sonne à la porte de Segundo Tevez, maçon au maigre salaire, pour essayer une nouvelle fois de le convaincre d’inscrire le petit Carlos à l’école de foot. Gêné, Segundo Tevez lui répondra alors : « Je ne peux pas te le laisser, car il n’a pas de chaussures pour jouer au foot ». Le gamin intégrera plus tard, et malgré tout, le centre de formation de Boca Juniors. Il y termine sa formation, en 2001, année où Carlos choisit définitivement d’abandonner le nom de sa mère pour prendre celui de son oncle.
Fils de Juan Carlos Cabral – tué par balles alors que Carlos n’a que 5 ans – et de Fabiana Martinez – alcoolique – qui n’ont pas pu l’élever, Carlos Tevez exprime d’ailleurs souvent une profonde reconnaissance envers son père adoptif. Tout n’est pas rose pour autant, car en 2001, le pays est en pleine crise financière. L’oncle a perdu son travail, et la nourriture manque pour rassasier les cinq enfants. Mais il y aura toujours une assiette qui attend l’espoir de la famille à son retour de l’entraînement. Les parents adoptifs se privent pour que les enfants mangent à leur faim.
Cicatrices du passé
Pour Carlos Bianchi, l’entraîneur avec lequel il va tout gagner ensuite à Boca Juniors (2001 à 2004), le secret du succès de Tevez vient de « sa détermination et de sa fierté ». « Il suffisait de le voir courir sur le terrain pour comprendre, il était différent de tous les autres, il disputait chaque ballon comme si c’était le dernier, il avait faim ». Il vit avec les cicatrices du passé, comme celle qu’il porte au cou, une grave brûlure qui lui a valu deux mois d’hospitalisation, après s’être aspergé d’eau bouillante, alors qu’il avait 9 mois.
De Fort Apache, il tient un de ses surnoms, « l’Apache ». Il est également surnommé « le joueur du peuple » ou plus affectueusement, « Carlitos » (petit Carlos). Par appât du gain, Tevez a décidé à bientôt 33 ans de filer vers la Chine, avec un salaire de près de 40 millions d’euros par saison pendant deux ans à la clé. Mais il n’a pas toujours privilégié la meilleure offre économique, au détriment de l’aspect sportif.
En 2015, Tevez a ainsi fait un sacrifice financier pour porter à nouveau le maillot de son club de cœur, Boca Juniors, renonçant à sa dernière année de contrat à la Juventus Turin. A Boca, il touchait 2 millions de dollars par ans, un salaire nettement inférieur à ce qu’il gagnait en Italie. Pendant cette dernière séquence argentine, il partageait sa vie entre La Boca, quartier populaire de la capitale argentine, et sa belle maison de San Isidro, banlieue cossue de Buenos Aires, où vit l’élite économique. Tevez est un enfant pauvre qui a fait fortune et en fait profiter sa famille, en leur offrant maisons et appartements. Il se passionne pour le golf et achète de somptueuses voitures tout en faisant discrètement des dons à des associations caritatives. Il s’est marié avant Noël avec la mère de ses trois enfants, rencontrée à l’adolescence. Mais la richesse attire toujours les voleurs. Pendant la noce, la maison de Carlos Tevez a été cambriolée.
Le Quotidien/AFP