Depuis plusieurs années, une vieille fable de Jean de La Fontaine est plus que jamais d’actualité. Sauf que personne ne semble croire en la vérité toujours brûlante qu’illustrent les bons mots de maître français.
Le Lièvre et la Tortue est pourtant une des œuvres les plus commentées, étudiées et récitées par les écoliers francophones. Avec Le Corbeau et le Renard , elle est un incontournable de ces histoires dont les morales marquent l’enfance.
Sauf que ce lièvre et cette tortue n’intéressent plus ceux qui font ce monde, persuadés qu’au XXI e siècle, la vitesse l’a nécessairement emporté sur la patience et la persévérance. Ainsi, sondeurs et spécialistes n’ont que peu d’égards pour l’incertitude de ces éléments qui foncent à leur rythme vers leur but, face à d’autres qui semblent bien plus destinés à les atteindre.
De surprise en surprise, de défaite en défaite, il serait peut-être utile de reconsidérer la notion même de favori(te). «Elle part, elle s’évertue/Elle se hâte avec lenteur/Lui cependant méprise une telle victoire/Tient la gageure à peu de gloire/Croit qu’il y a de son honneur», écrit le fabuliste.
Un classique à relire, au vu des résultats du référendum luxembourgeois de 2015, de l’élection américaine ou encore de la question du Brexit. Sans même parler de la primaire de la droite française, anecdotique face à de tels enjeux. Car à force de garantir que les élections sont jouées d’avance, il semblerait que les électeurs aient parfois envie de se comporter en tortue triomphante.
Alors, ceux qui prédisent déjà le résultat du référendum italien du week-end, des élections françaises et allemandes de 2017 feraient mieux de se replonger dans leurs classiques. Jean De La Fontaine reste un moderne parmi les modernes et son œuvre n’a de cesse de trouver écho dans nos vies quotidiennes.
Car «rien ne sert de courir, il faut partir à point» et «tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute» ne sont que deux morales des 243 fables choisies par le poète.
Christophe Chohin