Elle aurait dû entamer sa dernière décennie, mais la centrale de Cattenom (Moselle) subit depuis 6 mois un lifting dans le but affiché de la faire vivre au-delà des 40 années prévues à sa construction.
« Nous sommes dans un projet très engagé d’investir pour aller au-delà de 40 ans. Il y a des opérations que nous faisons aujourd’hui et qu’on ne fera plus », explique son directeur, Thierry Rosso. La ministre de l’Environnement et de l’Energie, Ségolène Royal, a laissé entendre en février qu’elle ne s’opposerait pas à une prolongation de la durée de vie des centrales. Mais pour tout ce qui les concerne, des travaux à la prolongation, seule l’Autorité de sécurité nucléaire (ASN) décide.
Cattenom, ce sont 4 réacteurs à eau pressurisée à la frontière avec le Luxembourg et à quelques encablures de l’Allemagne. Inaugurée en 1986, la centrale fournit 8% de la production nucléaire française lorsqu’elle fonctionne à plein régime. Son patron entend lui demander de le faire jusqu’en 2046, si l’ASN le permet. De mai à octobre, le réacteur numéro 1 a subi les premiers travaux, dans le cadre d’une visite décennale particulière qui s’inscrit dans le « grand carénage » d’EDF, un investissement de quelque 51 milliards d’euros pour 58 réacteurs.
Changement d’une turbine, amélioration des conditions de sécurité, installation d’un diesel d’ultime secours (DUS): le réacteur 1 est prêt à poursuivre son activité pour au moins 10 ans. La salle des commandes – le « temple » selon M. Rosso – a été modernisée, numérisée. Les armoires de données ont été changées et fixées au mur pour améliorer leur protection en cas de séisme.
Des transformateurs, qui servent à faire passer l’énergie sur le réseau en augmentant la puissance, ont été changés – une opération « que l’on ne fait qu’une fois dans la vie d’une centrale » – et 64 242 tubes de laiton ont été remplacés par du titane. La liste des travaux est longue, pour un coût global d’environ 100 millions d’euros. EDF a mené « un contrôle très intime sur des composants très importants ». La cuve, cœur du réacteur, a été inspectée millimètre par millimètre.
Autres aménagements de sécurité, les travaux dits « post-Fukushima », exigés pour toute centrale: amélioration des systèmes anti-inondation, climatiseurs supplémentaires en cas de canicule prolongée, grilles autour des installations extérieures pour empêcher, en cas de grand vent, qu’un objet ne vienne les frapper. EDF est moins prolixe sur les mesures pour assurer la protection du site. Des gendarmes sont présents, ainsi que des agents de sécurité, mais les détails ne peuvent être dévoilés.
La centrale « fait peur »
L’ASN doit se prononcer sur les modifications du réacteur 1. Ensuite, ce sera au tour des trois autres réacteurs. Lorsqu’ils seront reconnectés au réseau, « ils ne seront pas tout à fait les mêmes qu’avant la visite ». « L’âge de l’installation n’a au final que peu à voir avec son niveau de sûreté », soutient le directeur. Mais il faut encore convaincre les voisins. En avril, le Premier ministre du Luxembourg a proposé de payer pour le démantèlement de la centrale, affirmant qu’elle lui « fait peur ».
Pour Thierry Rosso, qui se refuse à commenter des « postures politiques », « une centrale nucléaire, forcément, ça amène toujours des questionnements ». D’où la volonté de communiquer, pour « démystifier ». EDF doit gérer les questions sur des anomalies détectées dans le suivi des processus de fabrication d’équipements d’Areva au sein de son usine du Creusot, utilisés pour les cuves de certaines centrales. Et cinq réacteurs doivent être fermés temporairement pour des vérifications sur des équipements clés susceptibles de présenter une teneur en carbone excessive.
Pour le directeur de Cattenom, « la loi de transition énergétique fixe 50% de nucléaire. Donc, elle confirme le nucléaire comme étant l’outil de production de masse d’électricité en France. Ca nécessite effectivement la prolongation d’un certain nombre d’installations ».
Le Quotidien/Afp