La ville américaine de Boston va replonger mercredi dans le cauchemar des attentats du marathon, avec l’ouverture du procès de son seul accusé, deux ans après le drame qui avait fait 3 morts et 264 blessés le 15 avril 2013.
Certaines victimes ont promis d’être là mercredi, espérant mieux comprendre un drame qui a brisé leur vie. (Photos : illustration AFP)
Djokhar Tsarnaev, musulman de 21 ans né au Kirghizstan, et qui avait émigré avec sa famille aux États-Unis à l’âge de 8 ans, risque la peine de mort pour ces attentats, les plus graves depuis le 11-Septembre aux États-Unis. Il a plaidé non coupable des 30 chefs d’accusation retenus contre lui, dont utilisation d’une arme de destruction massive ayant entraîné la mort. Il est aussi accusé, avec son frère Tamerlan, décédé depuis, d’avoir tué un policier alors que les deux frères tentaient de s’enfuir après avoir été identifiés.
Ils sont accusés d’avoir préparé seuls ces attentats, exemples de la menace des « loups solitaires » auto-radicalisés que redoutent tant les autorités américaines. Tamerlan Tsarnaev avait été tué dans la nuit du 18 au 19 avril 2013 à Watertown, en banlieue de Boston, lors d’un échange de coups de feu avec la police.
> Sous l’influence de son frère aîné ?
Son jeune frère, carrure frêle et visage d’adolescent durci par une petite barbe qu’il a laissé pousser en prison, est donc seul dans le box des accusés, au tribunal fédéral de Boston. La défense a prévu de décrire Tamerlan comme le meneur, le conspirateur en chef sans lequel rien ne serait arrivé.
Le jury, finalisé mardi après une sélection ralentie par les demandes répétées de la défense pour que le procès soit déplacé, et par plusieurs tempêtes de neige, est composé de huit hommes et dix femmes, tous blancs. Douze d’entre eux décideront de la culpabilité de Tsarnaev, mais aussi, dans un deuxième temps, de la peine de mort ou de la réclusion à perpétuité, seules options possibles s’ils le jugent coupable. Les six autres jurés sont des remplaçants.
Lundi, la défense a demandé une nouvelle fois le déplacement du procès, répétant que Tsarnaev ne pouvait pas être jugé équitablement dans la ville de 645 000 habitants, profondément marquée par les attentats.
Les procureurs devraient dès le début du procès à 9h (14h GMT) en rappeler l’horreur et détailler comment les deux bombes artisanales ont explosé dans la foule massée près de la ligne d’arrivée du marathon, tuant trois personnes, un petit garçon de 8 ans, une étudiante chinoise de 22 ans et une femme de 29 ans. Une quinzaine des blessés ont dû être amputés.
À l’époque, Djokhar Tsarnaev, qui avait obtenu en 2012 la citoyenneté américaine, semblait bien intégré, étudiant sur le campus de l’université du Massachusetts à Dartmouth, près de Boston. « Le gouvernement américain tue nos civils innocents. (…) Nous, musulmans, sommes un seul corps, vous faites du mal à l’un de nous, vous nous faites du mal à tous. (…) Arrêtez de tuer nos innocents et nous arrêterons », avait-il écrit pour expliquer son acte, à l’intérieur du bateau où il sera retrouvé, grièvement blessé, quelques heures après la mort de son frère.
Certaines victimes ont promis d’être là mercredi, espérant mieux comprendre un drame qui a brisé leur vie. Des soutiens de Tsarnaev sont également attendus devant le tribunal, dont la sécurité a été renforcée, avec leurs pancartes dénonçant force complots. La défense a demandé, en vain, qu’ils ne soient pas autorisés à y stationner. Djokhar Tsarnaev, né d’un père d’origine tchétchène et d’une mère du Daguestan, est depuis son arrestation détenu quasiment à l’isolement dans une prison hôpital à 70 km de Boston.
Il est jugé dans un État, le Massachusetts, qui a aboli la peine de mort depuis 1984. Mais s’agissant d’un acte de terrorisme avec utilisation d’une arme de destruction massive, il relève de la justice fédérale. L’une de ses avocates, Judy Clarke, est l’une des meilleures spécialistes de la peine capitale aux États-Unis.
Elle l’a évitée à plusieurs accusés, dont l’auteur de l’attentat des jeux Olympiques d’Atlanta en 1996, Eric Rudolph, Ted Kaczynski alias « Unabomber », l’ermite mathématicien qui avait envoyé entre 1978 et 1995 une quinzaine de paquets piégés faisant 3 morts et 23 blessés, ou encore Jared Loughner, auteur d’une fusillade mortelle dans laquelle avait été grièvement blessée l’élue Gabrielle Giffords en 2011.
Tous avaient plaidé coupable à un moment donné, en échange de la réclusion à perpétuité, ce que Tsarnaev peut encore faire. Le procès devrait durer jusqu’en juin.
AFP