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Le porte-avions Charles de Gaulle, un défi technique 24 heures sur 24


« Paré pont ! Paré partout ! Paré feu ! »: en quelques secondes, la catapulte propulse le Rafale à l’extrémité du pont d’envol, dans un rugissement de réacteurs, moment critique pour la machine et le pilote.

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Des avions Super Etendard sur le pont du porte-avions Charles de Gaulle qui sillonne dans les eaux du Golfe, le 26 février 2015. (Photo : AFP)

Sur le porte-avions français Charles de Gaulle, dans leur cabine au ras de la piste, l’ingénieur de lancement Timothée et son assistant Samuel ont les yeux rivés à chaque catapultage sur le chasseur-bombardier qui se présente devant eux et sur les hommes en blanc qui accrochent l’avion à son superpiston.

Quand tout est fin prêt, le pilote fait depuis son cockpit un signe de la main, se plaque contre son siège. Le chef de piste abaisse son drapeau vert et Timothée appuie sur le bouton « feu ». En 2,5 secondes, l’avion passe de 0 à 250 km/h et décolle. « On est toujours en train de regarder que tout se passe bien et qu’il n’y a personne au milieu », explique Samuel, entre deux mises à feu. « Au niveau du pont, il faut faire attention au souffle des hélicoptères, à celui du réacteur des avions. On peut se faire souffler et tomber à l’eau ».

Au moindre signe suspect, la procédure est suspendue et reprise à zéro. Pas question de laisser la moindre place au hasard quand la vie du pilote est en jeu, avec à la clé un risque d’éjection brutale au-dessus de la mer. La tension est à son comble, a fortiori quand le Rafale se prépare à décoller pour l’Irak. Le Charles de Gaulle est engagé depuis lundi dans la coalition internationale contre le groupe Etat islamique (EI).

> Au rendez-vous des vols

Dans le quotidien d’un porte-avions, le défi technique est permanent, du pont d’envol aux hangars logés 15 mètres plus bas, au niveau de la mer. Un ascenseur géant sert de trait d’union entre les deux. Il descend Rafale, Super-Etendard et hélicoptères chez les « mécanos », au retour de missions mouvementées ou de pannes techniques plus classiques. « Le défi, c’est d’être au rendez-vous des vols. Au moment où les opérations commencent, on va essayer de fournir un maximum d’avions prêts », souligne le capitaine de frégate Paul, commandant adjoint pour le soutien technique.

« Le défi de la journée, c’est de régénérer de manière très rapide, dans les intervols, les avions. A la fin de la journée, quand on a quelques heures sans vol, ce sera d’être capable de faire des maintenances plus lourdes pour que le lendemain, les avions soient tous de nouveau au rendez-vous », ajoute-t-il.

Quand les missions s’enchaînent, que les avions montrent de premiers signes de surmenage, les hangars de 4.500 m2 se transforment en ruche jusqu’à l’aube. Des hommes en maillot vert (couleur des mécanos) vérifient que les Rafale, tout juste revenus du territoire irakien, n’ont pas souffert de collision volatile ou de panne. Les armuriers, en rouge, s’activent autour des fixations de bombes et missiles.

> Une usine à bord

Les carlingues sont soigneusement lavées à la main pour prévenir la corrosion de l’air marin. La perforation par des tirs de canons est plus improbable, les avions volant très haut et l’ennemi, l’EI, n’ayant guère de moyens antiaériens. Des moteurs sont changés en trois heures, des circuits électriques réparés, des pièces refaçonnées. « Le porte-avions n’est pas seulement un terrain d’aviation. On a aussi une usine aéronautique à bord », note Paul, qui supervise 500 techniciens.

Un étage plus bas, les ingénieurs atomiciens veillent depuis leur salle de contrôle sur les deux réacteurs nucléaires qui fournissent en permanence la précieuse énergie nécessaire à la propulsion du porte-avions et à la puissance des flux de vapeur dans les catapultes. « Un caisson blindé protège l’ensemble de la centrale. Il est calculé pour (résister à) un choc avec un escorteur de 5 000 tonnes », relève Sébastien, commandant adjoint du navire. Et le risque d’un crash d’un Rafale ? « A côté, ce serait une mouche ! », dit-il.

AFP