Bien des décennies après la fin de la Seconde Guerre mondiale, il y a toujours des blessures sociétales qui ne sont pas guéries. Le Luxembourg a vécu le drame de la collaboration avec le nazisme autrement que la France, l’Autriche et les autres pays voisins. Néanmoins, dans l’air du temps, l’idéologie fasciste était réellement répandue.
Un auteur, Jean-Paul Hurt, vient de publier dans une maison d’édition luxembourgeoise un recueil biographique, E Liewensulaf. Biographesch Historesches 1937-1967 (en langue luxembourgeoise, ISBN 978-2-87967-210-6), dans lequel il dément que son père, condamné pour incivisme, ait été membre du Parti national-socialiste.
Les documents des procès d’épuration sont ouverts aux membres des familles concernées. Tout un chacun est libre de clamer publiquement son innocence et celle de ses ancêtres. Néanmoins, on peut se demander si c’est vraiment la bonne thérapie d’étaler au grand jour les traumatismes du vécu personnel. Nous répondons avec la phrase de l’écrivain allemand, antifasciste et communiste, Bertolt Brecht, dans son discours «An die Nachgeboren» (Aux générations futures, écrit dans les années 1930, au cours de son exil au Danemark) : «Gedenket unserer mit Nachsicht» (Souvenez-vous de nous avec indulgence).
Brecht ne pose pas la question du pardon, qui, à l’instar de la charité, est une notion religieuse, mais il préconise un monde meilleur. Ailleurs, dans la littérature, l’interrogation s’est posée souvent, si le commandant d’un camp de concentration pouvait être un père de famille affectueux après sa besogne.
Jean Rhein