La réforme fiscale comprend un passage qui, aux yeux du camp syndical, risque de tourner au désavantage des travailleurs frontaliers. La mobilisation est lancée.
Le passage en question de la réforme fiscale, qui doit entrer en vigueur le 1er janvier 2017, est jusqu’à présent passé quasi inaperçu au Luxembourg. Cela risque de changer dans les heures et jours à venir. Un papier publié lundi sur le site de nos confrères sarrois du Saarländischer Rundfunk (SR) dévoile en effet le risque qui guette les travailleurs frontaliers avec cette réforme. En l’absence du respect de conditions bien définies, ils seront imposés à partir de 2018 dans la classe 1 (célibataires), indépendamment de leur statut matrimonial. À la clé, le montant des impôts à payer sur leurs revenus risque donc sensiblement d’augmenter, alors qu’à la base la réforme fiscale vise à alléger la facture des contribuables, qu’ils soient résidents ou frontaliers.
Cette nouvelle disposition pourrait donc bien avoir l’effet d’une bombe à retardement. Le camp syndical se rend tout doucement à l’évidence. «Le passage en question nous avait déjà sauté aux yeux lors d’une première analyse sommaire du texte. C’est maintenant, lors des travaux au niveau de la Chambre des salariés pour aviser la réforme fiscale, que les inquiétudes sont devenues plus importantes», note le secrétaire général adjoint du LCGB, Christophe Knebeler.
Même si l’effet de la nouvelle disposition est à relativiser, principalement en raison d’une dérogation prévue par le texte de réforme, le camp syndical redoute que ce seront à nouveau les frontaliers qui seront amenés à boire la tasse. «Les effets de la réforme fiscale en ce qui concerne l’allègement de l’imposition risquent de s’envoler avec cette nouvelle disposition», met en garde Christophe Knebeler.
Entrevue demandée d’urgence avec Pierre Gramegna
Dans le camp de l’OGBL, l’agitation est également importante. Une entrevue a été demandée d’urgence avec le ministre des Finances, Pierre Gramegna, afin de clarifier ce point, qui poursuit à la base un objectif équitable.
«La réforme fiscale tend à assurer un traitement fiscal égal entre résidents et non-résidents», souligne ainsi l’exposé des motifs du texte de réforme. «L’imposition des contribuables non résidents mariés est remaniée pour permettre d’accorder, dès l’émission de la fiche de retenue (…) le taux d’impôt qui prend en considération l’intégralité des revenus du ménage tout en exonérant bien entendu les revenus dont le droit d’imposition appartient à l’État de résidence du frontalier selon les dispositions de la convention bilatérale contre les doubles impositions respectives», poursuit le texte de loi.
Si l’on pousse l’analyse plus loin, cette volonté de rendre plus équitable l’imposition des résidents et non-résidents risque cependant de coûter cher aux travailleurs frontaliers. «Un frontalier dont l’épouse travaille en Allemagne devra également déclarer ce revenu. Le revenu total servira de base à la définition du taux d’imposition, qui en fin de compte risque d’être plus élevé. En plus, le fait que le revenu allemand est imposé de son côté plus lourdement qu’au Luxembourg n’entre pas en ligne de compte. Le dilemme est donc total : aussi bien le passage à la classe 1 que le nouveau calcul du taux d’imposition pour demeurer dans la classe 2 risque de pénaliser le travailleur frontalier», note Christophe Knebeler.
Bien d’autres questions se posent encore dans cet épineux dossier. Il est à espérer que le camp politique clarifiera rapidement les choses, et ce avant l’envoi des lettres d’information aux personnes concernées, prévues dans le courant de l’année 2017.
David Marques