Pour avoir infligé à plusieurs reprises des coups à ses deux enfants en bas âge entre 2017 et 2019, une mère de 40 ans était convoquée, jeudi matin, à la barre du tribunal correctionnel.
«Pourquoi utiliser une branche pour infliger des coups de correction ? Des enfants de 5 et 6 ans, on peut les séparer sans morceau de bois.» Face aux juges, la mère de famille tarde à répondre. Le président de la 18e chambre correctionnelle insiste : «Je ne répète que ce que les enfants ont déclaré à la police.»
Il n’y a pas eu que des coups avec une branche d’arbre, il y a aussi eu ceux avec une petite tapette à mouches, des claques et enfin elle les aurait tirés par les cheveux. Les faits relatés avaient lieu à leur domicile à Schifflange. C’est l’état effrayé du fils de 6 ans qui avait alerté une professeur du Centre de logopédie en mars 2019. La peur que le garçon éprouvait à l’égard de sa mère l’avait obligée à signaler le cas. «C’est grave de faire des fautes, car je reçois des coups à la maison… », lui avait-il confié. Des propos que le garçon avait répétés à son instituteur, puis à la police lorsqu’une enquête avait été ouverte. La suite, on la connaît. La mère de 40 ans est aujourd’hui poursuivie pour «menaces d’attentat par gestes» et «coups et blessures volontaires» sur enfants de moins de 14 ans.
Le père ? «Il regarde la télé…»
Des faits auxquels le mari quadragénaire ne croit toutefois pas : «Mon épouse peut crier ou parler d’un ton plus élevé. Mais je ne pense pas que c’est quelqu’un qui puisse infliger des coups. Pour moi, c’est quelque chose d’inimaginable.» Et d’appuyer : «On est mariés depuis 13 ans. Je pense connaître mon épouse suffisamment.» «Elle peut peut-être taper gentiment sur la jambe sans lui faire mal…»
Le président enchaîne : «Comment pouvez-vous dire cela alors que vous n’étiez pas présent ?»
À la question de la police concernant ce que faisait le père, les enfants avaient en effet répondu : «Rien… il regarde la télé…»
Selon le père, le problème est arrivé quand il y a eu un malentendu entre l’enseignante et son épouse. Mais dans ce dossier, il y a des aveux de la prévenue. À la police, elle avait reconnu avoir quelquefois infligé des coups. Des coups qu’elle a tenté d’expliquer, jeudi matin, à la barre au vu des circonstances. «Je veux que mes enfants travaillent bien à l’école pour qu’ils aient des perspectives dans le futur.» Elle n’aurait pas non plus utilisé de «tronc d’arbre», mais une «petite branche d’arbuste». Et la tapette à mouches ? «Je l’ai montrée, mais je ne l’ai jamais utilisée !»
«Pourquoi votre enfant inventerait-il une telle histoire ?», tentera de creuser le président.
« Je fais de mon mieux pour l’aider à faire ses devoirs», terminera la prévenue avant de fondre en larmes.
«Votre tribunal doit tolérer les violences légères !»
Pour la défense, les faits ne sont pas dignes de poursuites pénales, car il s’agirait de violences légères. Le tribunal se montre surpris : «Vous étiez présent pour affirmer cela ?» «Le parquet non plus ne les a pas constatées», reprendra Me Sadan Ramovic qui conteste les coups. «Ce sont de simples gestes de correction quand les enfants se battent entre eux, argue l’avocate. C’est le regard d’un enfant dont il faut relativiser les propos. Il n’a pas atteint l’âge de raison. Il peut vite exagérer.» L’avocate demandera finalement l’acquittement : «Votre tribunal doit tolérer les violences légères !»
Ce n’est toutefois pas la position que le parquet partage. Sa représentante demande de porter crédit aux dépositions des enfants. D’autant plus que la prévenue a reconnu auprès de la police avoir donné des coups environ une fois par mois.
En recourant aux objets – la tapette à mouches, la branche – et en tirant les cheveux, la mère aurait clairement dépassé le droit de correction. La défense avait aussi soulevé l’absence de traces. «Mais il y a bien des traces psychiques, rétorquera la parquetière. Selon les professionnels, les enfants éprouvent une certaine crainte vis-à-vis de leur mère.»
«Ce qui importe au parquet, c’est que de tels faits ne se reproduisent plus», a-t-elle conclu en requérant 12 mois de prison avec sursis et une amende.
Prononcé le 30 janvier.
Fabienne Armborst