« C’est une urgence sanitaire », assurent les patients mécontents de la nouvelle formule du Levothyrox, qui rejettent les discours rassurants des autorités de santé sur ce médicament pour la thyroïde et ont annoncé vendredi leur intention de déposer plainte.
Quelques dizaines de personnes se sont rassemblées vendredi devant l’Assemblée nationale à Paris à l’initiative de l’Association française des malades de la thyroïde (AFMT). Leur but : demander l’abandon de la nouvelle formule de ce médicament du laboratoire allemand Merck, qu’elles accusent de provoquer d’importants effets secondaires (crampes, maux de tête, vertiges…).
Présente à la manifestation, l’avocate et ancienne magistrate Marie-Odile Bertella-Geffroy a expliqué avoir accepté de devenir « le conseil juridique » de l’association et vouloir porter l’affaire devant la justice. « J’ai été contactée par la présidente de l’AFMT pour déposer une plainte auprès du parquet du pôle de santé publique. Nous allons mettre en cause dans cette plainte contre X les autorités sanitaires et le labo », a déclaré celle qui a été à la tête de ce pôle jusqu’en 2013.
Selon elle, cette plainte devrait être déposée « la semaine prochaine », pour trois motifs : « mise en danger de la vie d’autrui, atteinte à l’intégrité physique, non-assistance à personne en danger ». Une première plainte pour « mise en danger de la vie d’autrui » a déjà été déposé à Mougins (Alpes-Maritimes) contre le laboratoire par une avocate, Anne-Catherine Colin-Chauley, elle-même traitée au Levothyrox. L’AFMT, soutenue par la députée européenne écologiste Michèle Rivasi, rejette les explications données par les autorités sanitaires. Selon ces dernières et le laboratoire, les effets indésirables ressentis par certaines personnes sont transitoires car dus à des questions de dosage, et vont s’estomper quand le bon équilibre sera atteint pour chaque patient.
Précision du dosage cruciale
« Je réponds à ça ce que répond Anny Duperey : on leur fera avaler la boîte et le carton avec ! », a rétorqué Chantal L’Hoir, reprenant une formule utilisée par l’actrice, qui prend elle-même ce médicament, dans sa lettre ouverte à la ministre de la Santé. « Cette nouvelle formule, celui qui veut la prendre et s’empoisonner, c’est son problème », a ajouté la responsable associative, qui devait être reçue en fin de journée au ministère. « On va demander de débloquer en urgence les stocks (de l’ancienne formule, NDLR) qui existent en Allemagne et en Belgique », a affirmé Chantal L’Hoir.
L’AFMT avait refusé de participer à une première réunion convoquée dans l’urgence mercredi par la ministre de la Santé qui avait reçu deux autres associations, Vivre sans thyroïde et France Assos Santé. La nouvelle formule du Levothyrox a été mise sur le marché fin mars. C’est l’Agence du médicament (ANSM) qui l’a réclamée au laboratoire afin, selon elle, de rendre le produit plus stable. Avec l’ancienne formule, selon l’ANSM, la teneur en principe actif (la lévothyroxine, une hormone de substitution) pouvait varier d’un lot à l’autre, voire au sein du même lot avec le temps. Or, la précision du dosage du produit est cruciale dans le traitement des maladies thyroïdiennes.
Le changement de formule ne porte pas sur le principe actif mais sur d’autres substances, les excipients. « Ces médicaments sont très sensibles et on ne peut pas, sans information ni procédure longue et scientifique en changer la formulation », a souligné Me Bertella-Geffroy, pour qui cette affaire est une « urgence sanitaire ». « On est des cobayes », a déploré l’avocate, elle-même traitée avec ce médicament prescrit à 3 millions de Français.
Les autorités de santé insistent sur le fait que les effets secondaires, bien que gênants, ne mettent pas en danger la vie des patients. Un argument qui ne convainc pas ces derniers.
Le Quotidien/AFP