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Tchernobyl : « Cela peut arriver en Europe »


Trente ans après la catastrophe de Tchernobyl, pire accident nucléaire de l'histoire, les craintes de voir un tel drame se reproduire restent vives. (illustration AFP)

Trente ans après la catastrophe de Tchernobyl, pire accident nucléaire de l’histoire qui a contaminé une bonne partie de l’Europe, les craintes de voir un tel drame se reproduire sont vives. Greenpeace n’en doute pas. L’autorité compétente au Grand-Duché, elle, note que la radioactivité postaccident s’est diluée.

Patrick Majerus est à la tête de la division de la Radioprotection au ministère de la Santé. Il n’était qu’écolier au moment de l’accident. Contrairement à la France, les autorités luxembourgeoises ont été plus réalistes : «Le ministère a émis un communiqué, notamment sur le passage du nuage. En Allemagne, des pluies ont accentué le phénomène qui a en conséquence été plus léger au Grand-Duché. Nous étions très loin des seuils où il aurait fallu avaler des comprimés d’iode, par exemple.»

En outre, des précautions ont été prises : «C’est surtout au niveau des aliments qu’il a fallu faire attention. Traverser un champ contaminé, c’est comme passer une radio, ce n’est pas grand-chose. Par contre, manger une salade qui a poussé dans ce champ, c’est être irradié de l’intérieur. Le gouvernement a pris d’autres mesures de précaution comme changer le sable de toutes les aires de jeux du pays. Comme c’est un nid à bactéries, c’était aussi une bonne occasion de faire place nette», continue l’expert en radioprotection.

Des mesures mensuelles depuis 1986

Aujourd’hui encore, des mesures mensuelles d’échantillons sont effectuée à travers le pays depuis 1986 : «Seul le césium 137 (NDLR : élément radioactif produit dans les réactions de fission nucléaire) reste plus longtemps : il a une demi-vie de 30 ans environ. Mais il est dilué dans la terre et nous sommes revenus à des niveaux pré-Tchernobyl depuis dix ans environ», estime-t-il.

Roger Spautz était quant à lui déjà militant chez Greenpeace en 1986, il révisait pour le bac quand un professeur est venu lui demander si l’équipe féminine de handball serait en sécurité lors de son déplacement en Suède : «Les infos venant de l’URSS filtraient au compte-gouttes, ce n’est pas comme aujourd’hui où on peut suivre un événement en direct. Le professeur pensait peut-être que j’avais d’autres informations via Greenpeace (il rit).»

Ce désormais spécialiste de la question nucléaire pour l’organisation écologiste salue l’attitude des autorités luxembourgeoises de l’époque : «Elles ont été honnêtes de dire que le nuage passait au-dessus du pays, contrairement à la France ! Des précautions ont été émises, comme éviter de manger des champignons. Mais ce qu’il faut se rappeler, c’est que, Tchernobyl ou Fukushima, cela peut arriver en Europe. Récemment, le directeur de l’Autorité de sûreté nucléaire en France a dit qu’il ne fallait pas dire s’il allait y avoir un accident nucléaire, mais quand.»

Audrey Somnard

Des sols encore contaminés

Des sols du continent européen sont toujours «contaminés» au césium 137, trente ans après la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, selon une étude de l’Association pour le contrôle de la radioactivité dans l’Ouest (ACRO) publiée mercredi.

tchernobyl
«La contamination des sols est très hétérogène, mais l’ensemble des échantillons de sol analysés en France (103) comme en Europe (17) présente une contamination», précise l’ACRO dans son étude sur le Cesium 137, basée sur la collecte de 364 échantillons (des sols à la viande de rennes) fournis par une centaine de «préleveurs volontaires» et trois associations dans 13 pays européens, entre octobre 2014 et décembre 2015. «On mesure jusqu’à 68 000 becquerels par kilo séché (Bq/kg sec) dans les sols des Alpes à Jausiers (Alpes de Haute Provence)», écrit le laboratoire associatif souvent sollicité par des associations antinucléaires mais aussi par des élus locaux proches de sites nucléaires.

«En France, l’est du pays présente encore des contaminations importantes. En plaine, on mesure jusqu’à 174 Bq/kg sec», à Labaroche (Haut-Rhin), estime l’ACRO qui a publié l’étude sur le site internet tchernobyl30.eu.org. Le césium 137 pas présent dans la nature Le césium n’est pas présent dans la nature et, sans Tchernobyl et les essais nucléaires atmosphériques des années 60, son niveau serait de zéro. L’ACRO redoute un «transfert possible vers une partie de la chaîne alimentaire».

L’association a analysé des champignons. 80% des échantillons sont contaminés, parfois de façon «très importante» : 4 410 Bq/kg sec dans des pieds de moutons au Luxembourg. Après la catastrophe de Fukushima, l’Union européenne a interdit l’importation de la plupart des denrées alimentaires japonaises dont la contamination était supérieure à 100 Bq/kg, pour les adultes, mais seulement 50 Bq/kg pour les nourrissons, rappelle l’ACRO. Si «les fruits et légumes analysés sont épargnés par la contamination par le césium 137», «ce n’est pas le cas du gibier», poursuit l’association.

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