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Syrie : la trêve de « la dernière chance » pour l’instant respectée


Ce lundi 12 septembre dans la ville de Dara, tenue par les rebelles, dans le sud-ouest de la Syrie. (photo AFP)

La trêve en Syrie, présentée comme la « dernière chance » pour sortir le pays du chaos, était globalement respectée mardi, les habitants dans plusieurs villes se félicitant d’avoir connu leur première nuit depuis des mois.

Les armes se sont tues juste après l’entrée en vigueur lundi à 18h de la trêve initiée par la Russie et les Etats-Unis, parrains respectifs du régime et de la rébellion, dans leur énième effort pour mettre fin à plus de cinq ans d’une guerre dévastatrice.

C’est la brutalité de la dernière bataille d’Alep, deuxième ville de Syrie, avec ses centaines de morts, qui a poussé Russes et Américains à chercher un accord pour mettre fin au cycle de violences.

L’arrêt des combats devra ainsi permettre l’envoi d’aides humanitaires urgentes aux centaines de milliers de personnes vivant dans les zones assiégées, notamment la partie rebelle d’Alep.

Mardi matin, les correspondants de l’AFP des deux côtés loyaliste et rebelle d’Alep, principal enjeu du conflit, n’ont fait état d’aucun tir ou bombardement durant la nuit. À l’est comme à l’ouest de la ville, les Alépins ont veillé dans la rue jusqu’à minuit, profitant du cessez-le-feu pour célébrer l’Aïd Al-Adha, la fête musulmane du sacrifice.

Selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), les principaux fronts –provinces d’Alep, de Damas et d’Idleb (nord-ouest)– sont « totalement calmes ».

Pour le secrétaire d’État John Kerry, qui a négocié l’accord avec son homologue russe Sergueï Lavrov, la trêve pourrait « être la dernière chance de sauver » la Syrie où le conflit a fait plus de 290.000 morts depuis mars 2011 et poussé à la fuite des millions de personnes.

« Nous avons pu dormir »

Dans de nombreuses villes et localités, notamment celles tenues par les rebelles et bombardées au quotidien par l’aviation du régime, l’heure était au soulagement.

« Généralement, nous ne fermons pas l’oeil de la nuit en raison du bruit des avions », témoigne Hassan Abou Nouh, un militant de Talbissé, fief rebelle dans la province Homs (centre). « Mais Dieu merci la nuit dernière nous avons dormi sur nos deux oreilles ».

Dans la province d’Idleb, où 13 civils ont péri lundi avant l’entrée en vigueur de la trêve, un militant a également rapporté une nuit calme.

« Cette fois-ci, nous avons pu bien dormir », affirme Nayef Moustapha, dans la localité de Salqine. Mais, un peu sceptique, il affirme que « les gens s’attendent à ce que ça reste calme juste durant l’Aïd ». À la faveur de cette trêve, l’ONU a fait savoir qu’elle « se tenait prête à fournir de manière urgente une aide humanitaire à ceux qui en ont besoin ».

Même si l’opposition et la rébellion, affaiblies sur le terrain, n’ont pas donné leur accord formel à la trêve et ont demandé des « garanties » à l’allié américain, elles semblent la respecter sur le terrain. Cela n’empêche que le scepticisme prévaut sur le succès de ce nouveau cessez-le-feu.

Après avoir donné son approbation à l’accord conclu vendredi par les Etats-Unis et la Russie, le régime a annoncé le gel de ses opérations militaires « sur le territoire » jusqu’au 18 septembre à 23h.

Comme lors de la précédente trêve fin février qui avait duré quelques semaines, les groupes jihadistes État islamique (EI) et Front Fateh al-Cham (ex-Front Al-Nosra, branche syrienne d’Al-Qaïda), qui contrôlent de vastes régions du pays, en sont exclus.

« La méfiance est grande »

Si elle tient, cette cessation des hostilités devra déboucher sur une collaboration inédite entre Moscou et Washington contre les deux groupes jihadistes.

Les Etats-Unis et la Russie cherchent à travers l’accord de trêve de favoriser une reprise des négociations entre régime et rebelles pour arrêter le conflit qui a aussi favorisé la montée en puissance de l’EI.

Le vice-ministre russe des Affaires étrangères Mikhaïl Bogdanov a affirmé lundi que « l’émissaire de l’ONU Staffan de Mistura devrait inviter toutes les parties (à des négociations) probablement au début octobre ».

Mais la tâche est très difficile, tant le conflit est complexe. Le président Bachar al-Assad a répété, malgré la trêve, sa « détermination à reprendre aux terroristes toutes les régions » du pays, éloignant toute perspective d’une solution politique rapide.

L’accord stipule un cessez-le-feu de 48 heures, renouvelables, dans toutes les régions à l’exception de celles où l’EI et le Front Fateh al-Cham sont présents.

Pour M. Kerry, le régime devrait s’abstenir de mener des raids « dans toute zone où se trouve l’opposition ». Or dans plusieurs zones, les rebelles sont alliés au Front Fateh al-Cham considéré comme « terroriste » par Washington et Moscou.

Sur la coopération inédite russo-américaine, un responsable du Pentagone a affirmé que si la trêve devait durer sept jours, cela n’impliquerait pas automatiquement le début de la coopération. « Les délais sont courts et la méfiance est grande ».

Le Quotidien / AFP