Rarement réquisitoire aura tant ressemblé à une plaidoirie : le parquet a requis jeudi la relaxe de la patronne du Fonds monétaire international (FMI) Christine Lagarde, estimant que son « choix politique malheureux » dans l’arbitrage Tapie n’était pas une « négligence pénale ».
Il faut attendre une heure et demie pour que le procureur général Jean-Claude Marin prononce la formule consacrée et demande à la Cour de justice de la République (CJR) de « renvoyer » l’ancienne ministre de l’Économie « des fins de la poursuite ». En clair, de l’innocenter. Mais dès le début de son réquisitoire, le magistrat de la Cour de cassation a argué que « les charges propres à fonder une condamnation pénale ne sont pas réunies ».
« Les audiences n’ont pas conforté une accusation bien faible, voire incantatoire », a attaqué le représentant du ministère public. Le parquet était hostile au principe même d’un procès devant la CJR, mais les magistrats instructeurs étaient passés outre. « C’est à la frêle limite entre le politique et le judiciaire que vous aurez à vous déterminer », a-t-il lancé aux trois magistrats professionnels et aux douze parlementaires qui composent cette juridiction d’exception. La CJR juge les crimes et les délits reprochés aux membres d’un gouvernement dans l’exercice de leurs fonctions. « Prendre une mauvaise décision n’est pas (…) en soi seul un délit », selon Jean-Claude Marin.
Décision attendue lundi
Assise, l’ex-ministre de Nicolas Sarkozy n’a laissé paraître aucune expression. Dans la plupart des procès la perspective du réquisitoire fait trembler les prévenus, pour elle c’est la meilleure journée depuis le début des audiences lundi. « Vous devrez éviter l’écueil de l’anachronisme judiciaire », c’est-à-dire juger le passé à la lumière du présent, a encore déclaré le procureur général aux juges.
A l’inverse du parquet, les magistrats instructeurs de la Cour avaient estimé que Christine Lagarde devait répondre devant des juges de sa « précipitation » et de son « incurie ». Les enquêteurs lui reprochent de s’être trop reposée sur ses collaborateurs et d’avoir ignoré les alertes de certains services de Bercy.
Le délit de « négligence » ayant permis un détournement de fonds par une personne « dépositaire de l’autorité publique » est passible d’une peine allant jusqu’à un an de prison et 15 000 euros d’amende. La défense plaidera vendredi. La décision de la CJR devrait tomber lundi.
Le Quotidien/AFP
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