Les forces de l’ordre espagnoles devaient tenter mardi de « neutraliser » les bureaux de vote prévus pour le référendum d’autodétermination interdit en Catalogne, cœur du dispositif, alors que le chef du gouvernement Mariano Rajoy, attendu à Washington, cherche des soutiens internationaux.
A J-5, le bras de fer entre Madrid et les dirigeants séparatistes de la Catalogne s’est poursuivi sur deux terrains fondamentaux : la logistique pour l’organisation du vote d’une part, attaquée sur tous les fronts par la justice, et d’autre part le terrain politique, avec l’enjeu fondamental de l’opinion publique étrangère.
Lundi soir, le parquet de Catalogne, région profondément divisée entre indépendantistes et partisans d’un maintien en Espagne, a ordonné à la police régionale de procéder à l’identification des responsables des bureaux de vote qui devraient servir au référendum de dimanche. Le procureur a demandé « à ce qu’ils soient entendus comme témoins pour qu’ils remettent la documentation qu’ils possèdent en rapport avec les faits, et afin d’être avertis concernant leur obligation de ne pas céder les centres pour la célébration du référendum ». « L’ordre a été transmis et sera exécuté en toute normalité », a déclaré un porte-parole de la police régionale catalane, les Mossos d’Esquadra. Le positionnement de cette police, autonome mais tout de même tenue de respecter la loi espagnole, est essentiel. Et pour parer à toute éventualité, le ministère de l’Intérieur espagnol l’a placée sous tutelle depuis le week-end.
En s’attaquant aux bureaux de vote, le parquet semble poursuivre la mise en oeuvre d’un plan visant tous les ingrédients d’un référendum. Depuis la mi-septembre, il a menacé de poursuites les maires qui prêteraient des locaux et désormais aussi les responsables d’autres institutions (écoles, centres de santé…). La commission électorale a dû démissionner en bloc, le tribunal constitutionnel ayant menacé ses membres d’amendes journalières de 12 000 euros. La police et la garde civile ont saisi près de 10 millions de bulletins de vote et quelque 45 000 convocations d’assesseurs. Et déjà 59 sites internet de promotion ou d’information sur le référendum ont été fermés, tandis qu’une procédure est en cours pour 85 autres.
« On va se les faire ! »
Face à ces actions, les autorités séparatistes au pouvoir dans cette région de 7,5 millions d’habitants dénoncent des méthodes « répressives ». « Le site de la fondation Franco est toujours opérationnel », mais pas ces sites, s’est plaint mardi le porte-parole du gouvernement régional catalan Jordi Turull. Les séparatistes se félicitent aussi de la parution dans plusieurs médias étrangers, y compris conservateurs, d’éditoriaux favorables à un référendum légal ou à davantage de flexibilité de la part du gouvernement de Mariano Rajoy, alors que la Catalogne s’enfonce dans une division qui déchire même certaines familles.
De source diplomatique espagnole, on indique « avoir conscience de cette affirmation selon laquelle nous serions en train de perdre la bataille de la communication. Mais il est plus difficile de raconter la vérité que les mensonges ». Le gouvernement assure qu’il ne fait qu’appliquer la Constitution qui n’autorise pas ce type de consultation, comme en France ou en Italie. Et souligne que les séparatistes ont adopté la loi convoquant le référendum sans laisser à l’opposition l’option d’en débattre en profondeur, avec un vote à la majorité simple alors que pour des réformes moins fondamentales la législation locale exige un vote des deux-tiers des élus.
Une tension palpable envahit l’Espagne. « L’idée d’un risque d’escalade de la violence nous inquiète », admettait lundi une source diplomatique espagnole. En Andalousie, des détachements de la garde civile en partance pour la Catalogne ont été salués par des habitants agitant des drapeaux espagnols. « On va se les faire ! », a scandé lundi la foule dans la ville de Huelva, un moment capturé par une vidéo devenue virale sur internet.
La España que heló el corazón de Machado, marcha otra vez sobre Catalunya ? pic.twitter.com/4cTLT3SQBF
— Jaume Asens #EnComú (@Jaumeasens) 25 septembre 2017
Le Quotidien/AFP