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Carlos, figure du terrorisme des années 70-80, jugé à Paris


Ilich Ramirez Sanchez, dit Carlos, 67 ans, va être jugé pendant trois semaines par une cour composée de magistrats pour l'attentat le plus ancien que lui reproche la justice française, il y a plus de 40 ans. (photo AFP)

Près de 43 ans après l’attentat du Drugstore Publicis à Paris, qui fit deux morts et des dizaines de blessés, le procès du Vénézuélien Carlos s’est ouvert lundi devant une cour d’assises spéciale pour assassinats terroristes.

Figure du terrorisme internationaliste des années 1970-1980, Ilich Ramirez Sanchez, dit Carlos, 67 ans, va être jugé pendant trois semaines par une cour composée de magistrats pour l’attentat le plus ancien que lui reproche la justice française, le dernier pour lequel il comparaîtra en France. Un peu vieilli, blanchi, amaigri mais souriant, Carlos a fait son apparition dans le box des accusés. Il a observé la salle, baisé la main de son avocate, Isabelle Coutant-Peyre, avec laquelle il s’est marié religieusement en 2001, avant d’envoyer des bises aux journalistes.

Le 15 septembre 1974, deux personnes ont été tuées et 34 autres blessées par l’explosion d’une grenade lancée dans l’enceinte du Drugstore Publicis, une galerie marchande qui se trouvait alors à l’angle du boulevard Saint-Germain et de la rue de Rennes, au cœur de Paris. La cour doit entendre 17 témoins et deux experts de ce dossier qui totalise 14 tomes de procédure. Carlos est passible de la réclusion criminelle à perpétuité. Mais le Vénézuélien, incarcéré en France depuis son arrestation au Soudan par les services français en 1994, a déjà été condamné à deux reprises à la peine maximale pour le meurtre de trois hommes, dont deux policiers en 1975 à Paris, et pour quatre attentats à l’explosif qui ont fait onze morts et près de 150 blessés en 1982 et 1983 à Paris, à Marseille et dans deux trains.

Le procès aura donc pour enjeux d’apporter un éclairage historique et de répondre à l’attente des victimes.

« Enfin un procès ! Les victimes attendent depuis si longtemps que Carlos soit déclaré coupable et condamné, leurs plaies ne se sont jamais refermées », a déclaré l’avocat Georges Holleaux, qui représente 18 d’entre elles, dont les veuves des deux hommes tués dans l’attentat. Au total, vingt-sept victimes de l’attentat du Drugstore se sont constituées parties civiles aux côtés de trois organisations. La tenue même de ce procès a été contestée par la défense, qui invoquait la prescription des faits. « Quel est l’intérêt de faire ce procès si longtemps après les faits ? C’est extravagant », a déclaré l’avocate de Carlos.

Pour faire plier le gouvernement français

Mais au terme d’une bataille procédurale, la justice a rejeté l’argument, estimant que la prescription avait été interrompue par les actes de procédure accomplis dans les autres dossiers Carlos, les faits s’inscrivant « dans la persévérance d’un engagement terroriste ». Dans une interview parue fin 1979 dans le magazine Al Watan Al-Arabi, Carlos avait reconnu avoir jeté la grenade au Drugstore Publicis. Mais il a contesté lors de l’instruction avoir donné cet entretien.

Pour l’accusation, l’attentat s’inscrivait dans le contexte d’une prise d’otages à l’ambassade de France à La Haye. Un commando de l’Armée rouge japonaise, émanation du Front populaire de libération de la Palestine, dont Carlos était membre de la branche « opérations spéciales », exigeait la libération d’un de ses membres interpellé à l’aéroport parisien d’Orly deux mois plus tôt. Maître d’œuvre de la prise d’otages de La Haye, Carlos aurait pris l’initiative de jeter la grenade pour faire plier le gouvernement français. Il parvint à ses fins, le détenu japonais fut libéré et put rejoindre Aden (Yémen) avec les autres membres du commando de La Haye.

L’accusation se fonde également sur les témoignages d’anciens compagnons de route de Carlos. Les enquêteurs ont aussi reconstitué le circuit de la grenade utilisée pour l’attentat. Elle provenait du même lot, volé en 1972 dans un camp militaire américain, que celles utilisées par les preneurs d’otages de La Haye ou celle découverte à Paris chez la maîtresse de Carlos.

Le Quotidien/AFP