L’ex-président brésilien Lula a réitéré son intention de revenir au pouvoir, dans sa première réaction à la confirmation mercredi en appel de sa condamnation pour corruption qui compromet sérieusement son avenir politique.
« Maintenant, je veux être candidat à la présidence de République », a lancé en début de soirée Luiz Inacio Lula da Silva, 72 ans, lors d’une manifestation qui regroupait plusieurs milliers de militants de gauche à Sao Paulo, la plus grande ville du pays. Quelques heures plus tôt, trois juges de la Cour d’Appel de Porto Alegre avaient reconnu à l’unanimité la culpabilité de l’icône de la gauche, dont la peine a été alourdie à 12 ans et un mois de prison, contre neuf ans et six mois en première instance.
Lula a affirmé lors de la manifestation n’avoir « jamais nourri d’illusion » sur l’issue du procès. « Lula est sur le banc des accusés, mais c’est le peuple brésilien qui a été condamné », a-t-il ajouté. « Mandela a été en prison, mais il en est sorti pour devenir président de l’Afrique du Sud », a rappelé l’ancien ouvrier métallurgiste. De nombreux recours étant encore possibles, une inéligibilité de Lula pourrait ne pas être établie avant des mois de bataille juridique, alors même que cette élection semble la plus incertaine depuis le retour du Brésil à la démocratie en 1985. Le fait que la décision ait été prise à l’unanimité limite toutefois ses possibilités de recours et pourrait accélérer la procédure.
Gleisi Hoffmann, présidente du Parti des travailleurs (PT), fondé par Lula, a déploré dans un communiqué une « mascarade judiciaire ». « Nous allons défendre la démocratie dans toutes les instances judiciaires et surtout dans la rue », a-t-elle affirmé. « Nous sommes dans la rue parce que nous défendons Lula bec et ongles, pour nous c’est le meilleur président du Brésil », a renchéri Albingo Barzi, qui manifestait sur la Place de la République, en centre-ville.
« Il se prend pour Dieu »
Bien qu’extrêmement populaire dans les régions pauvres grâce aux programmes sociaux engagés au cours de ses deux mandats (2003-2010), Lula est aussi cordialement détesté par une partie des Brésiliens, certains ayant manifesté mercredi à Porto Alegre, mais aussi à Sao Paulo et Rio de Janeiro. « Lula pense qu’on ne peut pas enquêter sur lui ? Il se prend pour Dieu », a déclaré Francini Rana, une manifestante à Sao Paulo. « Il faut qu’il aille en prison, il doit être condamné ».
Lula est accusé d’avoir reçu un triplex en bord de mer du groupe de bâtiment OAS en échange de l’attribution de marchés publics de Petrobras pendant sa présidence. Le juge Grebran Neto, premier à voter lors du jugement en appel, a affirmé qu’ « il existe des preuves au-delà de tout doute raisonnable » que « ce triplex était réservé au président Lula ». « L’ex-président était un des principaux artisans, sinon le principal, d’un vaste réseau de corruption (…) qui a fragilisé non seulement le fonctionnement de Petrobras, mais de tout le processus politique du Brésil », a-t-il asséné.
L’avocat de Lula, Cristiano Zanin Martins, avait auparavant affirmé que le triplex au cœur de la procédure « n’appartient pas à Lula » mais à OAS et que l’icône de la gauche « n’en a jamais reçu les clés et n’y a jamais passé une nuit ». Ses partisans ont également relevé que la justice brésilienne avait fait montre d’une célérité inhabituelle dans la procédure visant Lula et que les preuves contre lui, qui reposent sur une délation, étaient minces. Mais les déboires de l’ex-président avec la justice sont loin de s’arrêter à l’affaire du triplex : il est aussi visé par huit autres procédures, six déjà en cours et deux mises en accusation à venir.
Le Quotidien/AFP